Alors qu’Haïti traverse l’une des plus graves crises de son histoire et de son développement, l’arrivée du Secrétaire d’Etat américain Anthony Blinken a ravivé les tensions sur la scène politique. Le Dr Josué Renaud, membre du secteur des droits de l’homme et observateur attentif des relations internationales, a accordé à Rezo Nòdwès une interview exclusive pour analyser cette visite et ses répercussions sur la diplomatie et la souveraineté haïtienne.
Question : Dr. Renaud, que pensez-vous de la manière dont la visite de M. Blinken a été organisée, notamment avec la rencontre des autorités haïtiennes à la résidence de l’ambassadeur américain ?
Dr. Josué Renaud : C’est une véritable humiliation pour Haïti. Nous assistons à une scène qui symbolise l’infériorité diplomatique de notre pays face aux grandes puissances, en l’occurrence les États-Unis. La rencontre entre M. Blinken et les autorités haïtiennes de facto aurait dû se dérouler dans un cadre qui reflète un dialogue d’égal à égal. Mais là, que voit-on ? Nos dirigeants se sont déplacés à la résidence de l’ambassadeur des États-Unis, sur notre propre sol, comme s’ils étaient en territoire étranger. Kiyès ki te la anvan. C’est un coup dur pour notre souveraineté. Imaginez une seconde que cela se passe dans un autre pays ; jamais une telle situation ne serait tolérée.
Question : Vous évoquez un manque de respect dans cette rencontre diplomatique, notamment en comparaison avec la République dominicaine. Pouvez-vous nous en dire plus ?
Dr. Joseph Renaud : Absolument. Lors de sa visite en République dominicaine vendredi matin, M. Blinken a été reçu au Palais national avec tous les honneurs réservés à un dignitaire étranger de son rang. De plus, une conférence de presse conjointe a été organisée à l’issue des discussions. Mais ici en Haïti, nos dirigeants sont reçus comme des invités de seconde zone à l’ambassade américaine, à proprement parler. Il s’agit d’une différence de traitement flagrante et profondément blessante pour notre nation. Cette disparité reflète la façon dont certaines grandes puissances nous considèrent. Elles ne nous considèrent pas comme un partenaire, mais comme un État vassal qui doit suivre leurs directives.
Question : Parlons maintenant du contenu des discussions. Le Secrétaire Blinken a évoqué des sujets comme la sécurité et l’organisation des élections. Selon vous, Dr Renaud, ces priorités sont-elles réalistes dans le contexte actuel ?
Dr. Josué Renaud : Honnêtement, non. Parler d’élections dans un pays où les gangs contrôlent une grande partie du territoire, où les enlèvements sont quotidiens, et où l’insécurité règne en maître, c’est ignorer la réalité du terrain, la réalité des « territoires perdus ». Comment peut-on imaginer organiser des élections libres et justes dans ces conditions ? Blinken a beau parler de la nécessité de restaurer la démocratie, il semble déconnecté de ce que vivent les Haïtiens au quotidien. La priorité devrait être la sécurité, sans laquelle rien n’est possible, ni élections, ni développement économique à moins qu’on programme des élections à la Martelly 2011.
Question : Blinken a également annoncé une aide de 45 millions de dollars pour Haïti. Comment percevez-vous cette nouvelle aide financière ?
Dr. Josué Renaud : C’est un cache-misère. Laurent Lamothe, l’homme aux 21 stades, peut à lui seul débourser cette somme sur les 60 millions détournés, selon les Américains eux-mêmes. Nous avons déjà reçu des millions de dollars d’aide dans le passé, et où en sommes-nous aujourd’hui ? Toujours dans la misère et l’instabilité. Sans des réformes structurelles profondes et un contrôle rigoureux de la gestion de ces fonds, cette nouvelle aide ne fera qu’alourdir notre dette et enrichir de nouveaux riches, sans apporter de solutions durables. Nous sommes dans un cercle vicieux d’endettement et de dépendance, où l’argent ne résout rien s’il est mal utilisé. De plus, tant que la corruption continuera à gangrener nos institutions, cet argent ne profitera jamais à ceux qui en ont vraiment besoin.
Question : Vous avez mentionné la corruption. Pensez-vous Josué Renaud que les États-Unis en sont conscients et qu’ils font assez pour lutter contre ce fléau en Haïti ?
Dr. Josué Renaud : Les États-Unis savent parfaitement ce qui se passe en Haïti. Ils ont une grande influence sur nos affaires internes et connaissent les réseaux de corruption qui minent notre pays. Mais il faut se poser la question : est-ce vraiment dans leur intérêt de mettre fin à cette situation ? Le fait est que, tant que Haïti reste un pays fragile et dépendant, il est plus facile pour eux d’exercer leur influence. Prenons l’exemple de Laurent Lamothe, accusé d’avoir détourné 60 millions de dollars. Où sont les mesures pour récupérer cet argent et le remettre dans les caisses de l’État haïtien ? On préfère injecter de nouveaux fonds, tout en sachant pertinemment qu’ils risquent de disparaître dans les mêmes circuits. Michel Martelly, en attendant d’être recyclé comme Ariel Henry, poursuit malgré tout sa vie d’ermite aux Etats-Unis !
Question : Selon vous, pour revenir à la première question, quelles seraient les solutions pour sortir de cette impasse et restaurer la souveraineté d’Haïti ?
Dr. Josué Renaud : La première chose à faire est de redonner à Haïti une diplomatie digne de ce nom. Nos dirigeants légitimes doivent se tenir debout face aux grandes puissances et exiger un respect réciproque. Nous ne pouvons pas accepter que nos autorités soient traitées comme de simples subordonnés. Deuxièmement, nous devons absolument rétablir la sécurité sans faire de compromis avec les gangs. Cela ne se fera pas en un jour, mais c’est la condition sine qua non pour permettre la tenue d’élections crédibles et pour relancer l’économie. Enfin, nous devons mettre en place de véritables mécanismes de contrôle des fonds publics et de lutte contre la corruption. Sans cela, toutes les aides financières finiront dans les poches des mêmes réseaux et le peuple continuera de souffrir.
Conclusion : Une souveraineté à reconstruire
L’analyse du Dr. Josue Renaud fait ressortir les obstacles auxquels Haïti est confronté dans ses relations avec les grandes puissances, en particulier les Etats-Unis. La visite de M. Blinken, loin d’être un moment de renforcement des liens diplomatiques, a révélé les faiblesses de la souveraineté haïtienne et l’incapacité des autorités locales à imposer leur voix sur la scène internationale. Entre dépendance économique, insécurité galopante et corruption endémique, Haïti semble prisonnier d’un cercle vicieux dont il ne pourra sortir qu’en se réappropriant son destin et en jetant les bases solides d’un avenir plus stable et respectueux de sa souveraineté.
Tweet Kenya défend les dépenses de 2,1 Milliards de Ksh pour la Mission en Haïti alors que l’ONU fait face à des défis financiers. Concernant le déploiement du contingent de 600 policiers kenyans supplémentaires, annoncé par l’ex-Premier ministre Garry Conille pour novembre, aucune information publique récente ne confirme leur arrivée […]
For every Show page the timetable is auomatically generated from the schedule, and you can set automatic carousels of Podcasts, Articles and Charts by simply choosing a category. Curabitur id lacus felis. Sed justo mauris, auctor eget tellus nec, pellentesque varius mauris. Sed eu congue nulla, et tincidunt justo. Aliquam semper faucibus odio id varius. Suspendisse varius laoreet sodales.
Ce site utilise des cookies afin que nous puissions vous fournir la meilleure expérience utilisateur possible. Les informations sur les cookies sont stockées dans votre navigateur et remplissent des fonctions telles que vous reconnaître lorsque vous revenez sur notre site Web et aider notre équipe à comprendre les sections du site que vous trouvez les plus intéressantes et utiles.
Cookies strictement nécessaires
Cette option doit être activée à tout moment afin que nous puissions enregistrer vos préférences pour les réglages de cookie.
Si vous désactivez ce cookie, nous ne pourrons pas enregistrer vos préférences. Cela signifie que chaque fois que vous visitez ce site, vous devrez activer ou désactiver à nouveau les cookies.