Actualités

Pont Sondé : la FJKL critique la réponse tardive et insuffisante du gouvernement

today2024-10-11 1

Arrière-plan
share close

R A P P O R T  

Massacre de Pont Sondé : A qui la faute ? La FJKL s’interroge Octobre 2024

Massacre de Pont Sondé : A qui la faute ? La FJKL s’interroge I. Introduction 

1. Dans la nuit du 2 au 3 octobre 2024 un horrible massacre est perpétré à Pont  Sondé, localité relevant de la commune de Saint-Marc où est installé le Bureau  de l’Organisme de Développement de la Valée de  l’Artibonite (ODVA), localité réputée pour  son  marché,  ses  ouvrages  d’art  comme  son  Pont-jetée sur  la  rivière de l’Artibonite sur la route Nationale No.1 reliant le Nord et l’Ouest, et  le ″salee floodway″ qui est un chenal d’évacuation des crues de la rivière de  l’Artibonite. 

2. Le massacre  a  été  annoncé  sur  les  réseaux  sociaux  plusieurs  semaines  à  l’avance par le chef du gang de Savien, le nommé Luckson ELAN. 

3. La  société  civile  organisée  du  département  a  tiré  la  sonnette  d’alarme,  a  apporté son humble contribution aux fins d’éviter le drame annoncé. 

4. Tout indique que le massacre aurait pu être évité si les responsables de l’État avaient pris au sérieux la vie de la population. 

5. Que s’est-il passé exactement ? Nous tenterons de présenter ici les antécédents du massacre de Pont Sondé, le massacre proprement dit et les réactions des  autorités après le massacre. 

II. Les antécédents du massacre 

6. Plusieurs évènements ont précédé le massacre et ont servi de signes  avant-coureurs pour le massacre. 

7. Le gang de Savien, dénommé « Gang Gran Grif » dirigé par le nommé  Luckson ELAN (NIXON), spécialisé dans le kidnapping, le détournement de  camions de marchandises, le vol, le viol, les actes de torture, les actes humiliants et dégradants a appris qu’un poste de péage est installé à  l’Estère, sur la route Nationale No. 1 à hauteur de la Croix Périsse, par le  gang Kokorat San Ras qui est dirigé par le « Général Meyer ». 

8. Le poste de péage, selon les informations circulées au niveau du  département, rapporte davantage que le kidnapping et les autres formes  d’extorsion. 

9. A début du mois d’aout 2024 le « Gang Gran Grif » décida d’installer à Carrefour Paye, sur la route Nationale No. 1 (à l’entrée de la route  conduisant à Savien), un poste de péage. 

10. Il est réclamé aux chauffeurs de Moto deux cent cinquante gourdes (250.00G) pour passer le poste de péage, deux mille cinq cents gourdes ( 2,500.00G) aux chauffeurs de camionnette et cinq mille gourdes (5,000.00G) aux chauffeurs de mini bus. 

11. Un groupe de résistance armée installé à Pont Sondé décida de s’opposer  à cette pratique arguant que, si le gang ramasse de l’argent au jour le jour  à travers le poste de péage, il disposera des moyens pour acheter des  armes et les munitions dont il aura besoin et deviendra plus puissant. Le  groupe de résistance armée de Pont Sondé décida d’organiser une  déviation à travers une route agricole allant de Pont Sondé, zone « Patte 

Chwal » à Villard, en passant par Grassette et carrefour Kado évitant ainsi  la route Nationale No. 1 et le poste de péage du Gang Gran Grif. 

12. Cela représente un manque à gagner pour le « Gang Gran Grif » qui choisit  de réagir par de graves menaces de mort contre les usagers de la route  agricole de l’intérieur. 

13. Signalons ici que beaucoup de quartiers dans le département de  l’Artibonite comptent leurs propres groupes de résistance armée.  

14. Ce département connu pour les conflits terriens, est alimenté en armes et  munitions par des Haïtiens de la diaspora pour la défense des intérêts de  quartier ou de groupes d’héritiers. Ces groupes de résistance armée  bénéficient du support de la population, parce que non impliqués dans le  kidnapping et sont tolérés par les Forces de l’ordre avec lesquelles ils  travaillent généralement. Ils fréquentent les commissariats avec leurs  armes sans être inquiétés. Ces groupes fonctionnent comme les anciennes  brigades de vigilance, ancêtres des gangs actuels. 

15. Le gang « Gran Grif » par la voix de Luckson ELAN (Nixon) lance des  messages sur les réseaux sociaux : Ils vont tuer les personnes qui  empruntent la déviation de l’intérieur ou attaquer Pont Sondé pour faire un  massacre au cas où la route n’est pas débloquée au niveau de Pont Sondé. 

16. Depuis le lundi 23 septembre 2024, le Gang Gran Grif commença une série d’attaques laissant entendre que seule la route nationale No.1 passant par  leur poste de péage doit être empruntée par les usagers de la route, sinon  ils vont tuer ceux qui empruntent la route de l’intérieur. 

17. Le groupe de résistance de Pont Sondé s’y oppose. 

18. Une lutte oppose les deux groupes. 

19. Le mardi 24 septembre 2024, les bandits du Gang Gran Grif interviennent  à Kafou Kado et ont tué près de cinq personnes parmi elles, une  marchande d’arlequin (machann manje kwit) connue sous le nom de Ti Sé 

qui était au carrefour. Les bandits ont mis le feu et emporté toutes les  motocyclettes qui étaient au carrefour. 

20. Le vendredi 27 septembre 2024, tôt dans la matinée, le groupe attaque  Grassette où il a emporté les motocyclettes trouvées sur les lieux et  incendié un camion en semant la panique par un concert d’armes à feu. 

21. Le samedi 28 septembre 2024, une dizaine de véhicules en provenance de  l’Estère et des Gonaïves ont décidé de ne pas prendre la déviation et sont  passés par la route Nationale No.1 et ont payé les droits de passage exigés  par le Gang Grang Grif. 

22. Arrivés à hauteur de Pont Sondé, les hommes de la Force de Résistance de Pont Sondé ont tiré des coups de feu en l’air et contraints lesdits  véhicules à rebrousser chemin et ils ont bloqué la route. 

23. Les hommes de Savien sont venus débloqués la route et il y eu un  affrontement entre les deux groupes jusqu’à deux heures de l’après-midi. 

24. Sonson qui se présente comme le roi de Carrefour Paye, très remonté, a  juré que l’impertinence des hommes de la coalition de Pont Sondé ne  restera pas impunie. 

25. Tout ceci se passe dans l’indifférence totale des policiers cantonnés à Pont  Sondé prétextant n’avoir pas les moyens d’agir. 

26. La société civile du bas de Artibonite voyant venir le danger a pris contact  avec le Conseil-Présidentiel de Transition (CPT), avec la primature et avec  la Direction Générale de la PNH pour mettre des moyens et des hommes à  la disposition du département pour éviter le massacre annoncé. 

27. Les autorités ont prétexté un problème de moyens. 

28. La société civile décida de faire les frais. Près de trente mille dollars  (30,000.) américains sont dépensés par la société civile organisée pour  réparer à Port-au-Prince un char blindé qui était en poste dans l’Artibonite et qui était en panne. 

29. Après les réparations, les autorités ont déclaré qu’il leur faut des moyens  pour transporter le char Blindé par bateau à Saint-Marc. 

30. Survint une discussion avec les autorités. La société civile demande  d’envoyer d’autres chars accompagnés le char destiné à l’Artibonite par la  route et éviter les frais de transport. Les autorités refusent. 

31. Le 24 septembre 2024, un groupe de policiers arrivent à Saint-Marc dans  la soirée par bateau en direction du Plateau Central, mais le char de

l’Artibonite n’est pas arrivé par la même occasion. Ils ont patrouillé la ville  et sont repartis le 25 septembre. 

32. La société civile organisée décida à ce moment de payer les frais pour le  transport du char par bateau deux jours avant le massacre. Mais le char  n’est pas arrivé jusqu’au moment où l’irréparable s’est produit. Et ce fut  l’horreur du 3 octobre 2024 à Pont Sondé. 

III. Le massacre proprement dit 

33. Dans la nuit du 2 au 3 octobre 2024, Gang Gran Grif, tirant les leçons de  son premier échec décida d’attaquer Pont Sondé la nuit sur les flancs et  de l’intérieur. 

34. Un groupe s’est infiltré à Pont sondé avec la complicité du nommé Ti Pay  résidant à Pont Sondé, un groupe arrive par Moreau Paye et un autre  traverse la rivière par de petits canaux. 

35. Dès les premiers tirs, le groupe de résistance bloqua le Pont estimant que  le groupe arriva uniquement par Moreau Paye, mais les malfrats étaient déjà à l’intérieur de Pont Sondé. 

36. Pendant près de quatre heures d’horloge les bandits du Gang Gran Grif sèment la mort et la désolation à Pont Sondé. 

37. Les policiers cantonnés à Pont Sondé n’ont pas quitté leur commissariat  prétextant un manque de matériels pour intervenir. 

38. Les policiers de la Brigade Motorisée (BIM) cantonnés à l’Estère ne sont  pas venus en renfort. 

39. Ce n’est que vers sept heures du matin avec l’arrivée du char blindé cantonné à Verettes et d’autres membres de groupes de résistance des quartiers avoisinants que les malfrats ont été repoussés hors de Pont  Sondé. Ce fut le massacre. 

IV. Bilan 

40. Il est difficile d’établir un bilan exhaustif du massacre de Pont Sondé.  L’évaluation la plus réaliste fait état de : 

a) Morts

Plus de quatre-vingt-dix (90) personnes tuées ou une centaine si on  ajoute les personnes tuées à Kafou Kado avant le massacre. 

b) Blessés

Plus de deux cents. Les blessés sont recensés au niveau de quatre centres  hospitaliers et au niveau des centres de déplacés, il s’agit de : 

i. Hôpital Saint Nicolas de Saint Marc :  

Patients vus : 23 blessés par balles 

5 patients déjà mortes au moment d’arrivée à l’hôpital 

ii. Centre hospitalier Nouvel Espoir:  

Patients vus: 10 

iii. Complexe Medical de Pivert: 

Patients vus: 6 

Hommes: 2 

1 bébé de 22 jours 

1 bébé de 1 an 

Femmes: 2 

iv. Dispensaire Rue Christophe à Saint-Marc : 

Patients vus : 10 

hommes : 7, Femmes : 2, Enfant : 1 

v. Clinique mobile en date du 6 octobre 2024 au local de l’École Nationale  Antoinette Dessalines (St-Marc) 

patients vus: 182 

enfants: 70 

filles: 50 

garçons: 20 

c) Déplacés 

Plusieurs milliers de personnes. 

Les centres d’accueil identifiés sont : 

site Grand Gond 

site Venotte 

site Gardère 

site école Nationale Antoinette Dessalines 

site place Philippe Guerrier (Place Publique)

V. Réactions des autorités après le massacre 

41. Après le massacre les autorités ont envoyé onze (11) chars dans l’Artibonite alors qu’un seul aurait suffi pour éviter le massacre ; 

42. Ces chars sont installés à Pont Sondé et au Gonaïves avec l’objectif de  sécuriser la route Nationale No. 1 ; 

43. Il n’y a toujours pas de véritables résultats suites aux opérations effectuées  dans les bases des gangs ; 

44. Le samedi 5 octobre 2024, un chauffeur de camionnette du nom de Jonel  DORCIUS alias Ti Mouche, habitant de la localité de Haut-Feuille, qui profita  du passage des chars pour prendre la route a été tué d’une balle en plein  cœur par le Gang Grang Grif. Les policiers à bord de leurs chars n’ont pas  protégé le chauffeur et n’ont pas réagi après l’attaque. C’est pourquoi la  population commence à dire que les chars sont envoyés dans l’Artibonite  pour faire du show médiatique ; 

45. Les changements opérés au niveau du Département de la Police de  l’Artibonite et du commissariat de Saint-Marc ne donnent pas encore de  résultats. Les nouveaux responsables ne sont pas immédiatement opérationnels. 

VI. Conclusion et recommandations 

46. Le massacre de Pont Sondé démontre à quel point le droit á la vie est  banalisé en Haïti. 

47. Les efforts de la société civile organisée du département pour éviter le  massacre n’ont pas trouvé de réponses satisfaisantes au niveau de  l’appareil de l’État.  

48. Ce massacre aurait pu être évité si un seul char blindé était posté à Pont  Sondé et si la corruption dans la gestion de l’argent du service de  renseignement n’était pas la règle. 

49. Pour un tel massacre qui a couté la vie à plus d’une centaine de personnes, aucun responsable de l’État n’a assumé la faute. Ni le ministre de l’Intérieur,  ni le ministre de la Justice, ni le Directeur Général de la Police ne s’est senti  coupable. Aucun n’a offert leur démission à la nation. 

50. Les groupes de résistance armée ne peuvent se substituer à l’État pour la  question de la sécurité publique. Elles peuvent même se révéler un facteur  aggravant. 

51. La PNH et la Force Multinationale avec l’assassinat du chauffeur de  camionnette de Haute-Feuille démontrent que la sécurité de la population

ne passe pas par la multiplication du nombre de chars blindés. Des  éléments des Forces de l’ordre qui occupent effectivement le territoire dans  tous les coins du pays sont indispensables pour garantir la sécurité de la  population. 

52. Il y a une urgente nécessité de former des soldats en grande quantité pour  les forces armées d’Haïti afin de quadriller le pays avec des agents  responsables de l’application de la loi. La question de la sécurité est une  question de souveraine nationale. 

53. Le désarmement des gangs et des bandes armées passe par une force  armée robuste, bien équipée, présente sur l’ensemble du territoire national  avec une capacité de réaction rapide dans les quartiers, les corridors, les  villes, les routes, les ports et les sections communales. 

54. Tout responsable qui se montre incapable de répondre au besoin urgent et  pressant de sécurité de la population doit avoir le courage de tirer la  révérence. 

55. Fort de tout ce qui précède, la Fondasyon Je Klere (FJKL) recommande : 

1. d’identifier, de rechercher et de procéder à l’arrestation de tous les  massacreurs et de les traduire par devant la justice pour qu’ils soient  sanctionnés conformément à la loi ; 

2. de renforcer les Forces Armées d’Hait par le recrutement massif et la formation  intensive de milliers de jeunes soldats ; 

3. de mettre fin à la corruption dans la gestion des fonds destinés au service  d’intelligence ; 

4. d’organiser et de renforcer le service d’intelligence nationale ; 

5. de renforcer la capacité sanitaire du département de l’Artibonite à travers ses  hôpitaux, ses centres de santé et le personnel soignant ; 

6. de désarmer les gangs et toutes les bandes armées ; 

7. d’apporter le support nécessaire aux victimes, aux déplacés internes pour la  reprise de leurs activités dans des conditions sécurisées. 

Port-au-Prince, le 10 Octobre 2024

The post Pont Sondé : la FJKL critique la réponse tardive et insuffisante du gouvernement first appeared on Rezo Nòdwès.

Écrit par:

Rate it

Articles similaires

Actualités

HUEH – Assassinat de deux journalistes : Suivi des actions du Gouvernement

Tweet Le 24 décembre 2024, la nation haïtienne a été choquée par une attaque armée d’une violence extrême perpétrée à l’Hôpital de l’Université d’État d’Haïti (HUEH). Cet acte barbare a coûté la vie à deux journalistes et à un policier, ainsi que plusieurs autres personnes gravement blessées, dont des membres […]

today2025-01-16


0%