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Le nouveau gouvernement indonésien fait avancer un plan de transmigration, provoquant des protestations en Papouasie

today2025-03-11

Le nouveau gouvernement indonésien fait avancer un plan de transmigration, provoquant des protestations en Papouasie
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La politique déplace et prive de leurs droits les Papous autochtones

Publié à l’origine sur Global Voices en Français

 

Papua protest

L’ancienne prisonnière politique Sayang Mandabayan tient une affiche sur laquelle est écrit « Je rejette la transmigration ». Photo publiée sur le compte X (Twitter) de Veronica Koman, utilisée avec permission.

[Tous les références dans le texte sont en anglais, à l’exception de celui marqué.]

Le président indonésien Prabowo Subianto, qui a pris ses fonctions le 20 octobre 2024, a annoncé la relance du programme de transmigration, qui encourage les citoyens à peupler la région orientale du pays, notamment la Papouasie, une province située à l’extrême est de l’archipel qui lutte depuis des décennies pour son indépendance de Java. Le gouvernement indonésien a déclaré qu’il cherchait à promouvoir le « bien-être du peuple », mais les critiques avertissent que le plan pourrait déplacer davantage la population papoue autochtone.

La Papouasie a été annexée par l’Indonésie en 1963, mais cette annexion a rencontré une résistance farouche de la population locale et un mouvement d’autodétermination continue d’exister à ce jour.

Les Papous autochtones ont des racines ethniques divergentes des Indonésiens javanais ainsi que des traditions et des histoires culturelles uniques. Les Papous sont depuis longtemps confrontés au racisme, à la discrimination, à la violence et au déplacement de la part de l’Indonésie, qui s’est battue pour conserver la province riche en ressources.

Afin de reprendre le contrôle de la Papouasie et d’écraser tout mouvement de rébellion, le gouvernement a mis en œuvre entre 1964 et 1999 un programme de transmigration qui a facilité la réinstallation de 78 000 familles des îles densément peuplées d’Indonésie, comme Java et Sumatra, en Papouasie. Au cours de cette période, des témoins ont déclaré que « des terres coutumières ont été confisquées (et) des forêts ont été abattues » tandis que le peuple autochtone Malind n’avait pas le droit de parler sa langue maternelle. Le programme a été suspendu en 2001, mais la transmigration non officielle a persisté.

Ces dernières années, l’Indonésie a intensifié son déploiement militaire, ce qui a conduit à des affrontements intenses et à la militarisation des communautés. Selon les Nations Unies, entre 60 000 et 100 000 Papous ont été touchés par ces opérations.

Prabowo [fr.], un ancien officier militaire accusé d’avoir enlevé des militants, était le gendre du président qui a lancé le programme de transmigration. Quelques jours après son investiture, il s’est rendu en Papouasie pour vérifier les progrès réalisés dans le développement de plantations destinées à améliorer la sécurité alimentaire du pays. Cependant, certains groupes papous ont dénoncé ce programme de déforestation qui menace la biodiversité de la région et déplace les villageois locaux.

Le Mouvement uni pour la libération de la Papouasie occidentale a souligné le lien entre la renaissance de la transmigration et la conversion forcée des forêts en plantations agricoles :

Ce n’est pas une coïncidence si Prabowo a annoncé un nouveau programme de transmigration au moment même où son régime de déforestation écocide s’intensifie. Ce double agenda représente les deux facettes du colonialisme indonésien en Papouasie occidentale : l’exploitation et la colonisation. L’Indonésie ne veut que les ressources de la Papouasie occidentale ; ils ne veulent pas de notre peuple.

Le chef du groupe a salué les étudiants papous qui ont organisé des manifestations contre la politique de transmigration :

L’avocate des droits de l’homme Veronica Koman a publié des photos et des vidéos des manifestations en Papouasie contre le plan de transmigration :

Le groupe de la société civile Civicus a constaté que les attaques contre les manifestations pacifiques en Papouasie se sont intensifiées à l’approche de l’investiture de Prabowo.

Des militants papous ont été la cible de tirs, d’intimidations, de harcèlement et de mauvais traitements en raison de leur militantisme. Les attaques et les assassinats de journalistes se sont poursuivis, notamment en Papouasie.

En outre, cinq nouveaux bataillons ont été déployés et au moins 2 000 militaires ont été envoyés en Papouasie en septembre et octobre.

Le père John Bunay, président de la Commission pour la justice, la paix et l’intégrité de la création du diocèse de Jayapura, a tiré la sonnette d’alarme au sujet de la confiscation des terres en Papouasie. « Il y a tellement de migrants qui arrivent en Papouasie. Les non-Papous ont confisqué l’espace vital du peuple papouan autochtone. »

Les Parlementaires internationaux pour la Papouasie occidentale ont appelé le gouvernement indonésien à permettre au Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme de vérifier la situation en Papouasie. Le groupe a également critiqué l’impact négatif potentiel de la relance du programme de transmigration.

L’objectif de la transmigration était de diluer la population indigène mélanésienne, tout en s’assurant le contrôle de la riche base de ressources naturelles de la Papouasie occidentale.

La transmigration a produit une discrimination structurelle dans l’éducation, les droits fonciers et l’emploi. Il existe un niveau élevé d’inégalités de revenus et de richesses entre les Papous et les Indonésiens, tandis que les migrants dominent le marché du travail.

Mais le ministre de la Transmigration, Iftitah Sulaiman Suryanagara, a affirmé que le programme ne se contenterait pas de relocaliser des personnes, mais « améliorerait la qualité des ressources humaines grâce à des approches socioculturelles ». Il a ajouté :

Notre objectif principal ne se limite plus à la relocalisation des populations, une mesure qui, par le passé, était interprétée à tort comme un transfert de la pauvreté d’un endroit à un autre. Au contraire, nous allons déployer tous les efforts possibles pour réduire la pauvreté et améliorer le bien-être des populations.

Écrit par: Viewcom04

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