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Peut-on confier une nouvelle Constitution à ceux qui baignent dans le naufrage d’Haïti ?

today2025-06-30

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Attention! Ne jamais confier à un incendiaire la rédaction du code du bâtiment.

La question paraît brutale, presque sacrilège. Et pourtant, elle s’impose, posée avec gravité par l’actualité haïtienne. Alors que l’État vacille, que les institutions sont en lambeaux, et que la population vit dans une insécurité permanente, des voix s’élèvent, notamment via TV5MONDE et Rezo Nòdwès, pour rappeler une vérité crue : Haïti, aujourd’hui, n’est pas un État fonctionnel. La formule — « naufrage d’un État » — est plus qu’une image. Elle est le diagnostic sans appel d’un pays gouverné par une élite qui, au lieu de redresser la République, organise méthodiquement sa faillite. Dans ce contexte, la perspective d’une réforme constitutionnelle, pilotée par les responsables mêmes de ce naufrage, interroge à la fois la légitimité, la morale et le droit.

Le pouvoir en place, dénué de mandat populaire, entend modifier ou réécrire la loi fondamentale. Or, selon l’article 5 de la Constitution haïtienne de 1987, « la souveraineté nationale réside dans l’universalité des citoyens ». Cela signifie que le peuple demeure seul détenteur légitime du pouvoir constituant. En l’absence d’élections générales depuis 2016, et sans Parlement fonctionnel depuis 2020, toute tentative de réforme constitutionnelle par une autorité non élue relève de l’usurpation juridique. Le Conseil présidentiel de transition, tout comme les gouvernements précédents, n’a ni l’onction populaire ni la légitimité institutionnelle pour engager une refondation. C’est l’équivalent, en droit, de confier à l’incendiaire la rédaction du code du bâtiment.

La défiance n’est pas qu’une question d’impression. Elle repose sur des faits têtus. En 2024, Transparency International attribue à Haïti une note de 16/100 sur son indice de perception de la corruption, le plaçant parmi les dix pays les plus corrompus de la planète. Ce score, ignoré par les partenaires internationaux comme le PNUD ou la CARICOM, devrait pourtant disqualifier tout processus politique majeur non encadré par une supervision rigoureuse. Car comment imaginer des élections libres, ou un référendum crédible, pilotés par un exécutif soupçonné d’impunité, de clientélisme et d’illégalité ? Dans toute démocratie sérieuse, la transparence n’est pas une option — c’est une condition de légitimité.

Le comble, c’est la manière. Mardi dernier, un conseil des ministres s’est tenu en urgence, durant à peine 30 minutes, pour adopter deux textes majeurs, dont un nouveau Code de procédure pénale. Une telle célérité ne témoigne pas d’efficacité, mais d’opacité. Il s’agit là d’un contournement pur et simple des normes de délibération publique. Ce genre de pratiques expéditives est aux antipodes de l’esprit constitutionnel, qui exige réflexion, concertation, débats ouverts et participation citoyenne. À défaut de ces garanties, la refonte constitutionnelle ne sera qu’une opération de recyclage politique, destinée non pas à construire une nouvelle République, mais à prolonger la survie de ceux qui ont mis l’ancienne à genoux.

cba

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