Un an après la mise en place du Conseil Présidentiel de Transition (CPT), le Bureau de Suivi de l’Accord de Montana (BSA), qui avait initialement soutenu le processus en désignant Fritz Alphonse Jean, puis en appuyant sa candidature à la présidente tournante – table tournante -, rompt désormais publiquement avec cette expérience politique. Dans une déclaration rendue publique le 3 avril 2025, le BSA exige la dissolution immédiate du CPT, qu’il accuse d’avoir trahi sa mission, dérivé dans l’opacité et compromis toute perspective de retour à une gouvernance légitime en Haïti.
Cette rupture, qui engage la responsabilité morale et politique de l’un des principaux initiateurs de l’Accord de Montana, intervient dans un contexte de décrédibilisation accélérée du Conseil. Composé de figures cooptées à travers des compromis politiques imposés, notamment sous pression régionale et internationale, le CPT s’était vu confier la tâche délicate de piloter la transition post-Jovenel Moïse. Le Bureau de Suivi avait accepté, non sans tension interne, de participer à ce processus, espérant préserver un minimum d’influence citoyenne sur une architecture largement dominée par les appareils partisans et les intérêts étrangers.
Or, selon les signataires de cette déclaration — parmi lesquels Monique Clesca, Magali Comeau Denis, Jean-Claude Barré, Camille Chalmers, et d’autres acteurs de la société civile — le Conseil Présidentiel a échoué à incarner l’esprit de transition démocratique et inclusive. Bien au contraire, il aurait consolidé des logiques de captation du pouvoir, d’arrangements clientélistes et de négligence envers les impératifs urgents de sécurité, de gouvernance, de transparence et de justice sociale.
La note de 14 sur 100 attribuée au CPT par Transparency International est citée comme un indicateur dramatique de sa faillite morale et administrative.
Plus grave encore, l’implication de trois membres du Conseil dans un scandale de braquage de la Banque Nationale de Crédit, est un grave fait qui s’ajoute aux accusations récurrentes de détournements de fonds, d’enrichissement personnel et de clientélisme. Le CPT, loin de poser les fondements d’un nouvel ordre démocratique, s’est selon BSA, est mué en organe de pouvoir discrétionnaire, opaque et illégitime.
La déclaration du 3 avril intervient peu après une prise de parole publique de Fritz Jean, actuel coordonnateur du CPT, annonçant que l’institution quitterait le pouvoir le 7 février 2026. Pour le BSA, cette annonce relève de la stratégie dilatoire. Elle masquerait une volonté de prolonger un régime de fait, sans base populaire ni fondement constitutionnel, tout en préparant des élections organisées sous tutelle politique, avec l’objectif avéré de neutraliser les oppositions critiques et de manipuler le cadre électoral.
En dénonçant la volonté du Conseil d’écarter la Constitution de 1987 et d’introduire une nouvelle charte politique sans consultation populaire, le Bureau de Suivi alerte sur le risque d’un basculement autoritaire maquillé en réforme institutionnelle. Cette entreprise, couplée à l’incapacité manifeste du CPT à restaurer la sécurité, à soulager la misère, ou à répondre à l’urgence humanitaire, justifie, selon le BSA, une rupture immédiate.
Ainsi, le Bureau de Suivi de l’Accord de Montana appelle à la dissolution du Conseil Présidentiel de Transition et à la mise en œuvre urgente d’un cadre alternatif de transition. Celui-ci devrait reposer sur une conférence nationale souveraine, la participation effective des secteurs populaires, la mise en place d’un mécanisme de justice transitionnelle, et la réaffirmation du principe de souveraineté populaire comme base de toute refondation.
Cette prise de position, par sa gravité et la stature de ses signataires, marque un tournant dans le paysage politique haïtien. Elle révèle la profondeur du désenchantement à l’égard d’une transition qui, aux yeux du BSA, n’a été que la continuité de l’ordre ancien sous un autre nom. En dénonçant une trahison de la transition, le Bureau de Suivi de l’Accord de Montana cherche à réorienter le débat national vers une exigence de légitimité, de reddition de comptes et de justice.
La rupture avec Fritz Alphonse Jean et le rejet du cadre transitoire actuel ne sont donc pas de simples ajustements tactiques : ils constituent un acte de responsabilité politique et une tentative de réinscrire la transition haïtienne dans l’horizon du droit, de l’inclusion et de la dignité nationale.
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