Le dimanche 10 novembre 2024, le limogeage du Premier ministre de facto, Gary Conille par le Conseil Présentiel de Transition (CPT) – l’autre tête de l’exécutif de facto –, a été rendu public. Cette décision, annoncée depuis quelques jours dans les médias traditionnels et sur les réseaux sociaux, qui prendra effet le lundi 11 novembre, n’a surpris personne. Pas même le premier concerné, qui savait mieux que quiconque qu’il était sur un siège éjectable.
Pourtant, cela n’a pas empêché, Gary Conille, ancien chef de gouvernement de Michel Martelly (PHTK), en 2011, de ruer dans les brancards, pour tenter de sauver son poste. Dès la circulation sur les réseaux sociaux de l’arrêté signé par huit membres sur neuf du CPT – à l’exception de son acolyte Edgard Leblanc Fils (OPL), lui-même proche du régime néo-duvaliériste-macoute PHTK –, le Premier ministre, est passé à l’attaque à la sulfateuse. Et surtout, comme un petit chien ayant pris un mauvais coup.
Conseillé, notamment, par certains journalistes qui ne font pas honneur à leur profession et un vieux de la vieille – professeur de droit, ancien ministre de la Justice de facto de 2004 à 2005, ancien Premier ministre nommé par Michel Martelly en 2011 mais dont l’investiture a été rejetée par le Sénat, le 3 août 2011 –, Gary Conille a, d’abord, écrit au directeur général des Presses Nationales, organe de diffusion du « Journal officiel », Ronald Saint-Jean, pour lui dire : « [je] vous enjoins de ne pas publier la résolution prise par le Conseil Présidentiel de Transition pour mettre fin aux fonctions du Premier Ministre. » Oubliant ainsi le principe du droit qui veut que l’autorité de nomination est celle de révocation.
Visiblement, pris de panique, dans la foulée, il s’est adressé, dans le même état d’esprit, à la population, dans une lettre dont la forme paraît assez ambiguë sur ses réelles intentions, pour contester l’illégalité de son limogeage, sous prétexte de décision anticonstitutionnelle. Aurait-il déjà oublié qu’il a été nommé par ce même CPT en dehors de tous prescrits légaux et constitutionnels ?
Gary Conille, reconnu pour être sous l’influence de l’ancien Premier ministre PHTK, Laurent Lamothe, sanctionné par les États-Unis et le Canada, pour corruption, est dans le déni absolu. Vivrait-il sur une autre planète ? Une planète où les progrès sociaux, politiques et économiques seraient si spectaculaires qu’il pourrait se permettre de défier ses supérieurs hiérarchiques qui lui demanderaient, à tort ou à raison, des comptes sur son échec en matière de lutte contre le terrorisme, la vie chère, l’insalubrité publique, bref sur la mise en place d’un contexte serein en vue de l’organisation de prochaines élections dans le pays.
Or, il n’échappe à personne que ce technicien, coordonnateur de projets de développement pour le compte de l’Unicef notamment dans des pays africains, a lamentablement échoué dans ses fonctions de chef de gouvernement. Pire, il semble s’être livré, comme ses prédécesseurs, dans des marchandages impardonnables avec les gangs, au lieu de donner les moyens nécessaires et suffisants à la Police nationale d’Haïti (PNH) pour neutraliser ces terroristes qui sèment le deuil et l’ignominie en permanence sur une large partie du territoire national, et en particulier dans la région métropolitaine de Port-au-Prince, devenue méconnaissable.
L’attitude autocrate de Gary Conille, assoiffé de pouvoir absolu pour le compte des PHTKistes, se plaçant dans une logique de rapport de force, avec l’appui implicite des terroristes – qui, dès dimanche soir, ont annoncé la couleur du sang qu’ils feront couler partout sur les artères du pays – a fini de convaincre les observateurs avisés de son néo-duvaliérisme. Sa traîtrise, sa myopie sociopolitique, son cynisme monumental ne pouvaient déboucher que sur son limogeage comme étant un mauvais coucheur. Dans aucun pays au monde, même en cohabitation à la tête de l’exécutif, un Premier ministre ne saurait s’arroger le droit de défier de la sorte le Chef de l’État . N’en déplaise aux fameux conseillers de sa cour des cireurs, le pouvoir de nomination confère le pouvoir de révocation. Pas besoin d’avoir suivi de longues études en droit administratif pour le savoir. La contestation de l’arrêté pris par le CPT, en date du 10 novembre 2024, devrait donc s’avérer vaine.
Finalement, vu l’organisation de la vie politique haïtienne, Gary Conille ferait mieux de s’abstenir de toute tentative de rébellion qui pourrait lui valoir une arrestation de la part de la PNH pour insubordination, trouble à l’ordre public, complot contre la sûreté de l’État… Dans cette optique, soit il s’incline et décide de mener un combat politique à la loyale en s’engageant sur le terrain dans la perspective des prochaines échéances électorales, soit il retourne à l’étranger à son poste à l’Unicef dont il n’aurait pas démissionné, assurant ainsi ses arrières depuis le début… Ce faisant, Gary Conille avait pris le poste de Premier ministre sans aucun agenda sérieux voire sans une conviction patriotique.
Atansyon pa kapon !
En tout cas, une chose est sûre, son passage à la tête du gouvernement, dans les conditions pour le moins douteuses que l’on sait – le CPT y a, d’ailleurs, ses pleines responsabilités –, aura été une erreur de casting fatale pour Haïti, laquelle est plus que jamais plongée dans le désarroi total.
Est-ce que l’arrivée du nouveau Premier ministre, Alix Didier Fils-Aimé, changera la donne ?
The post L’Édito du Rezo: Gary Conille à la Primature d’Haïti : une erreur de casting fatale first appeared on Rezo Nòdwès.