Par Fortenel Thélusma, enseignant-chercheur
Cette étude a été réalisée en 1989 pour l’obtention de ma licence en linguistique (Faculté de linguistique appliquée, Université d’État d’Haïti). Vingt ans plus tard, elle a été intégrée dans le livre intitulé : Éléments didactiques du créole et du français : le cas de la prédication nominale, des verbes pronominaux et du conditionnel (Fortenel Thélusma, Éditions Imprimerie Le Natal). Cette reprise partielle se justifie aujourd’hui en raison du fait que, quoique encore d’actualité, le sujet reste peu connu et le travail de recherche n’a pas réellement atteint le public visé (linguistes, étudiants en linguistique et enseignants de créole). Le contenu restera donc intact. Cependant, de légères modifications seront apportées en termes de recadrage scientifique. Il convient de signaler ici une grande carence en matière de recherche en syntaxe créole. Les travaux les plus importants dans ce domaine sont l’œuvre de M. Robert Damoiseau, professeur émérite à l’Université des Antilles et de la Guyane (UAG).
D’entrée de propos, précisons que cette étude se situe dans le cadre du fonctionnalisme. « On regroupe sous le terme « fonctionnalisme » un ensemble de courants qui, insistant sur le rôle essentiel de la langue comme instrument de communication, se donnent pour objectif de caractériser dans cette perspective les diverses fonctions des éléments linguistiques. La question fondamentale pour un fonctionnaliste est donc la suivante : à quoi tel élément de la langue sert-il – en d’autres termes, quelle est sa fonction ? » (UNIVERSALIS.fr , écrit par Catherine FUCHS, consulté le 22-12-24). Avant d’en arriver au nœud de la question, la prédication nominale en créole haïtien, on fera le point sur la prédication en français et en créole de manière générale, la différence entre un nominal et un verbal.
I- Prédicat : Généralités
En linguistique française, le prédicat occupe une fonction centrale au sein de l’énoncé, la deuxième fonction par ordre d’importance étant le sujet. Son rôle principal consiste à fournir des renseignements sur celui-ci, placé généralement à sa gauche. Le verbe est spécialisé dans la fonction prédicative, d’autres éléments comme les nominaux ou les adjectivaux peuvent jouer ce rôle mais ils doivent être accompagnés d’un auxiliaire de prédication. Comparer :
Le gardien de but a attrapé le ballon. Vs Alexandre Pierre est le gardien de la sélection haïtienne de football ou Cet élève est studieux. Dans le premier exemple, le verbe « attraper » assure naturellement sa fonction prédicative, tandis que, dans les deux suivants, le nom « gardien » et l’adjectif « studieux » doivent recourir à la copule « être » comme auxiliaire pour remplir la fonction prédicative. En fait, qu’entend-on par auxiliaire de prédication ? « L’« auxiliaire de prédication » – terme et concept emprunté à D. François (1975) est ce monème qui réalise la prédication de toutes sortes d’unités non spécifiques. À la suite de S. Chaker (1983 : 321-326), nous avons rajouté à cette dénomination la notion de spécifique, parce que l’auxiliaire de prédication examiné ici […] a un caractère particulier et bien défini : sa fonction syntaxique principale est d’indiquer et d’actualiser le terme prédicatif qu’il précède toujours. Tous deux constituent un énoncé non-verbal complet et indépendant » (Comptes rendus du G.L.E.C.S., XXXIII, 2000: 165-187 SYNTAXE INTEGREE DE L’ENONCE NON-VERBAL RIFAIN : L’ENONCE A AUXILIAIRE DE PREDICATION SPECIFIQUE1 par Mena LAFKIOUI) (Inalco – Crb).
Par ailleurs, à propos de la notion du prédicat, Salem Chaker (p. 6416-6423 https://doi.org/10.4000/encyclopedieberbere.3809) (2015) précise ce qui suit. « En syntaxe, elle a une signification très précise : le Prédicat (ou généralement le groupe ou syntagme prédicatif, désormais SP) est le constituant ultime d’un énoncé complet, non tronqué et auto-suffisant, qui ne peut être supprimé (ou « effacé » disent les linguistes), l’énoncé devant rester grammatical et sémantiquement acceptable au terme du test d’effacement. On peut donc définir le prédicat comme le noyau syntaxique (et sémantique) minimum de toute phrase bien formée, autour duquel s’organisent les autres constituants de l’énoncé. Pivot de l’organisation syntagmatique de la phrase, le Prédicat est aussi généralement porteur de l’information centrale de l’énoncé (« ce qui est dit à propos de quelque chose ou quelqu’un »), rejoignant ainsi les approches et définitions sémantico-logiques ».
Qu’en est-il alors du créole haïtien ?
II- Le rôle prédicatif en créole haïtien
En créole, comme en français, le verbal a la vocation d’être prédicat. Cependant, dans cette langue, ce rôle peut être rempli par des monèmes qui, par ailleurs, ont d’autres emplois, selon leurs classes syntaxiques. Parmi eux, on peut citer l’adjectif, la préposition, l’adverbe et le nom, objet de la présente étude.
Rappel
1- Le verbe
Il remplit, on le sait déjà, toutes les conditions pour jouer le rôle de prédicat. En effet, il peut être affecté par les catégories temporelle, aspectuelle et modale.
– Temps
a- Jak te travay yè (passé).
b- Jak ap travay ankò semèn pwochèn (futur).
Dans le premier exemple, le temps passé est marqué respectivement par les morphèmes te et yè, alors que dans le second, le futur est signalé par ap et semèn pwochèn. Dans les deux cas, on le voit bien, il y a distanciation entre le moment d’énonciation et le déroulement du procès.
– Aspect
a- Jak ap travay. Pa deranje li (aspect imperfectif).
b- Jak travay chak maten (aspect itératif).
En a-, la situation de communication permet de constater qu’il y a coïncidence stricte entre le déroulement du procès et le moment d’énonciation. Le morphème grammatical ap marque dans ce cas l’aspect inaccompli du procès travay. Dans l’autre exemple, le groupe autonome indique que le procès fait l’objet d’une répétition mais qu’il n’est pas inscrit dans un cadre temporel quelconque.
– Mode
Dans les deux premiers exemples (cf. Temps) le procès est inscrit dans le cadre d’une temporalité liée à la réalité des énoncés. Mais, dans les exemples suivants :
– Jak ka travay demen.
– Fòk Jak travay pou bay timoun yo manje.
le procès n’est que virtuel, il exprime respectivement une hypothèse et une obligation.
2- L’adjectif
Il a été déjà démontré, ailleurs (cf. R. Damoiseau, 1982), qu’à l’instar du verbal, l’adjectif pouvait remplir le rôle prédicatif sans auxiliaire.
– Temps
a- Fiy sa a te bèl anpil lè li te jèn (passé).
b- Tan ap bèl demen (futur).
Bèl, à l’origine, adjectif, fonctionne ici comme prédicat avec les marques temporelles te et ap.
– Aspect
a- Se gran ou ap gran, fòk ou chanje konpòtman (aspect imperfectif).
b- Jaden m’ nan kòmanse bèl (aspect inchoatif).
Gran fonctionne ici avec la marque aspectuelle de l’imperfectif, accompagnée de la forme emphatique, tandis que kòmanse indique que le procès bèl est à son début.
– Mode
a- Nèg k ap file fi pa dwe razè (obligation).
b- Li posib pou dlo li te bwè a te sal (hypothèse).
Dwe et posib, ici, sont les marques de la modalisation.
3- La préposition
Il est tout à fait remarquable de voir fonctionner en créole haïtien des prépositions et même des adverbes comme prédicats et sans auxiliaire de prédication. À défaut d’explication précise, on se contentera d’en faire le constat dans les exemples suivants.
-Temps
a- « Lajan Fè fanm kultive ak gran nèg ki gwo soulye » (présent de vérité générale), feu Rosny Jn-Baptiste, alias Ti Manno, célèbre chanteur du konpa direct, dans la chanson intitulée « Lajan ».
b- Yè Jan te ak Andre (passé).
-Aspect
Le fonctionnement de la préposition avec ap aspectuel dans le rôle de prédicat semble impossible. Néanmoins, on peut la retrouver dans d’autres formes aspectuelles comme l’itération :
M’ap toujou ak ou.
– Mode
Mwen ka anvan, mwen ka apre tou (doute).
4 -L’adverbe
– Temps
– Nou te ansanm yè (passé).
– Demen, n’ap ansanm ankò (futur).
– Aspect
Impossibilité avec ap aspectuel mais attestation possible avec l’itération :
– Nou la chak dimanch.
Notons ces deux énoncés « Devan devan nèt » et « Deyò deyò nèt » (servant souvent de slogan) dans lesquels devan et deyò sont respectivement utilisés d’abord comme sujets, puis comme prédicats, le procès étant envisagé hors du temps avec le sens de vérité générale.
– Mode
– Fòk tout ekip la ladan (obligation).
– M ka la tou, wi (probabilité).
III- Différence entre un nominal et un verbal
A- Le Nominal
Il s’identifie par deux critères principaux :
1) Le critère fonctionnel
– Pwofesè a pa la (fonction sujet).
– M rankontre pwofesè a yè (expansion directe).
– M pral kay pwofesè a (expansion autonomisée par un monème fonctionnel).
2) Le critère combinatoire
Il est combinable à certaines unités spécialisées dans la fonction du déterminant.
– Pwofesè a travay byen.
– Pwofesè sa a sot Jakmèl.
– Pwofesè li a pati.
B- Le verbal
Il se définit également par deux critères :
1- Le critère fonctionnel
Le verbal est spécialisé dans le rôle prédicatif. En tant que prédicat, il représente le noyau de l’énoncé ; par lui, donc, passent les relations de tous les éléments de l’énoncé. En le supprimant, on détruit ces relations automatiquement et on peut aboutir à des phrases agrammaticales :
1) Bòb ale lopital kay mè yo.
2) Andre ap swaye malad lopital Bon Samariten.
Dans ces deux exemples, le message est centré sur le prédicat verbal. En supprimant celui-ci, on obtient deux informations différentes. Dans le premier énoncé, lopital deviendrait prédicat, dans le second, c’est malad qui remplirait cette fonction :
– Bòb lopital kay mè yo.
– Andre malad lopital Bon Samariten.
Mais la situation serait totalement différente dans les énoncés suivants, si on supprimait leurs prédicats :
– Pyè renmen diri ak lalo.
– Dana danse bal chak samdi swa.
* Pyè diri ak lalo
* Dana bal chak samdi swa.
2) Le critère combinatoire
Le verbal est généralement combinable avec les modalités de temps, d’aspect et de mode.
– Koute, non. Men radyo a ap pase mizik nwèl (marque aspectuelle).
L’emploi de ap dans cet énoncé indique qu’il y a coïncidence entre le déroulement du procès pase et le monent d’énonciation.
– Jan te chante legliz la yè (marque temporelle).
Te indique que le procès chante est situé antérieurement au moment d’énonciation.
– Bato a ka debake sou waf la jodi a (probabilité).
Ka suggère seulement que le procès debake peut se réaliser, il n’y a donc pas de certitude.
Dans la pratique et de manière générale, existe-il réellement une cloison étanche entre le comportement du nom et celui du verbe en créole haïtien ?
Les exemples qui suivent apporteront un éclairage suffisant pour la compréhension du fonctionnement de ces deux entités :
– Franklen pwofesè depi dizan.
– Andre direktè de faktori an menm tan.
– Filip agwonòm Lavale.
– Michèl doktè kounyeya.
– Msye chapant san li pa te lekòl.
– Fanm sa a lougawou pa w, yo kenbe l deja sou do kay moun!
On le voit bien, les nominaux pwofesè, direktè, agwonòm, doktè, chapant, lougawou se comportent comme les verbaux. Ils perdent leurs caractéristiques générales pour assumer le rôle prédicatif, sans auxiliaire. De fait, ils véhiculent, dans leur signifié, la notion d’activité, le trait dynamique propres au verbal.
Inversement, certains verbaux peuvent se comporter comme de véritables nominaux. En témoignent les exemples suivants :
– An n al fè on ti pale.
– Manje sa a gen move gou.
– M pa renmen manje a.
– Chante sa a pa bèl.
Ces quelques exemples, qui pourraient se multiplier, cristallisent le renversement des rôles de ces deux catégories grammaticales. Des lexèmes qu’on retrouve souvent comme verbaux se transforment en nominaux dans la pratique langagière. Ils peuvent remplir toutes les fonctions du nominal et se combiner aux unités spécialisées dans la fonction du déterminant. Dans ces conditions d’enchevêtrement, il est difficile de parler de classe nominale et de classe verbale en créole haïtien.
IV- La prédication nominale
1- Condition générale d’accessibilité du nominal à la fonction prédicative.
En créole haïtien, n’importe quel nominal se trouvant dans une position spécifique au verbal et donc constituant le noyau de l’énoncé dans lequel il est utilisé peut accéder à la fonction prédicative à condition d’être accompagné d’un auxiliaire et plus spécialement se. En réalité, c’est sa seule grande différence avec le verbal qui, parce qu’il a la vocation d’être prédicat, remplit naturellement et spontanément sa fonction, sans recours à un auxiliaire.
Machin sa a se yon pèlen.
– Wobè se pwofesè lekòl.
– Kochon kreyòl se bwat sekrè malere.
– Konesans se richès.
– Klod se gran nèg.
Il ne faut pas confondre le se, auxiliaire de prédication avec le se
d’emphase comme dans l’exemple qui suit :
Se mache n’ap mache, pa gen gade dèyè.
Ici, mache est un verbe.
À quelles conditions le nominal peut-il accéder à la fonction prédicative sans le sésame se ?
2- Nominaux accédant à la fonction prédicative sans se
2.1- Nominaux référant à un animé
En 1989, une enquête (*) a révélé, pour la première fois, que des nominaux pouvaient fonctionner comme prédicats sans se. En effet, de l’ensemble du corpus étudié (1705 nominaux), 252 sur 335 référant à un animé remplissent cette fonction. Deux sous-ensembles ont été répertoriés : des nominaux référant à un animé humain et des nominaux référant à un animé non humain (à un animal). Évidemment, si la base de données avait été davantage enrichie, on aurait abouti à un nombre plus élevé de nominaux pouvant fonctionner à l’instar des verbaux.
2.1.1- Nominaux référant à un animé humain
On peut les subdiviser en trois parties :
– ceux qui sont liés à une profession, une fonction ou un métier
. Msye chapant
Cet homme est charpentier.
. Li direktè de faktori.
Il est directeur de deux usines.
. Li enspektè lekòl zòn 3, Pòtoprens.
Il est inspecteur d’école à la zone 3 de Port-au-prince.
. Pyè senatè nan depatman lwès.
Pierre est sénateur du département de l’ouest.
– ceux qui se réfèrent à un comportement jugé négatif
. Msye masisi.
Cet homme est un homosexuel.
. Ou timoun toujou.
Vous n’êtes encore qu’un enfant (sens péjoratif).
– Fi sa a bouzen pase rat.
Cette femme est une pute de renom.
– Ou abitan twòp.
Vous êtes trop rustre
– Ceux qui véhiculent le trait de description
. Madanm li katolik.
Sa femme est catholique (de religion).
. Jak eritye de kawo tè.
Jacques est héritier (hérite) de deux carreaux de terre.
. Nèg sa a tafyatè.
Cet homme est un ivrogne.
. Li sèjan fouye.
Il est sergent-fourrier.
2.1.2- Nominaux référant à un non humain
Ce sous-ensemble peut être réparti en deux groupes :
– les nominaux qui véhiculent un trait de comportement jugé négatif
. Moun sa yo bourik pase ki !
Ces gens sont d’une grossièreté sans pareil !
. Ti gason sa a chat konsa !
Ce petit garçon est un voleur !
. Nèg sa a chen pase ki !
Cet homme est sans scrupule !
. Msye kochon anpil !
Cet homme est très malpropre !
– ceux qui véhiculent le trait de description
. Msye chen nan jwèt la.
Ce monsieur est bon dernier au jeu.
. Politisyen sa yo anganman konsa.
Ces politiciens ne sont que des caméléons.
. Ou pentad, papa !
Que tu te fais rare !
. Gade, msye ap krab kò li.
Regarde comme il se cache.
Notons, toutefois, que, entre les deux sous-parties, trait de comportement « négatif » et trait de description, qu’il s’agisse des animés humains ou non humains, on peut hésiter :
« Politisyen sa yo anganman konsa » peut être considéré aussi bien comme un jugement négatif que comme une description. Il en est de même pour « ou timoun toujou », « fi sa a bouzen pase rat », « ou abitan twòp », etc.
C’est le lieu de rappeler que le rôle de prédicat est une caractéristique essentielle du verbal. Le nominal, pour remplir cette fonction, doit se démettre de ses fonctions et positions habituelles. Si dans certaines langues, le nominal accède à la fonction prédicative à l’aide d’un auxiliaire de prédication ou tout simplement à l’aide d’une copule (le français en l’occurrence), en créole haïtien, il remplit cette fonction de façon spectaculaire, à l’instar du verbal, dépendamment de son signifié. Toutefois, on vient de le constater, la majorité des nominaux qui jouissent de ce privilège, réfèrent à des animés. Quelle en est l’explication ?
On constate que les lexèmes référant à un animé, analysés dans cette étude, véhiculent notamment des traits de comportement, de profession ou de métier ou encore de description. Or, tous ces traits sont liés à la notion d’activité qui est le propre de la prédication. On sait, par ailleurs, que certains nominaux véhiculent au niveau de leur signifié le même trait dynamique que des verbaux (nomination, par exemple. En ce qui concerne la présente recherche, on observe bien, ici, la convergence entre le sens et la syntaxe.
D’autre part, il semble que la fréquence des unités leur procure cette possibilité, cette liberté plus que d’autres, à remplir le rôle de prédicat. Et pour ce qui concerne les nominaux référant à un animé humain, le poids du statut social, dans le cas des noms de profession, joue un rôle capital (li doktè, li enspektè…). En ce qui a trait aux noms d’animaux, ils sont liés au vécu des locuteurs (msye kochon twòp, fanm sa a bourik konsa…).
En définitive, la meilleure explication de cette particularité du fonctionnement de ces nominaux doit être puisée dans le contexte socioculturel dans lequel évolue le peuple haïtien, utilisateur de la langue créole.
2.2- Nominaux référant à un inanimé
Une trentaine de nominaux du corpus étudié, référant à un inanimé peuvent fonctionner aussi comme prédicats à l’instar du verbal. S’ils présentent des caractéristiques communes liées à leur nouveau statut de prédicats, ils peuvent être, cependant, divisés en plusieurs sous-groupes :
– ceux qui véhiculent la notion d’activité liée à l’utilisation d’un instrument
. « Li makake madanm mwen, li baton pou li »
Il a battu ma femme, il l’a rouée de coups de bâton.
. « Li zam pou ti jennonm nan ».
Il a tué le jeune homme par balles.
– Li banbou pou msye.
Il l’a battu de coups de bambou.
– ceux qui véhiculent le trait de description
. Ou wè rad sa a, li rad jaden, li rad lekòl, li rad legliz.
Voyez-vous cet habit, il est utilisé pour les champs, pour l’école et pour l’église.
. Ou wè sa a, li fèy koklich, li fèy grip.
Cette feuille combat la coqueluche et la grippe.
. Li kaye 15 men m p ap vann li.
C’est un cahier de 15 centimes mais je ne le vendrai pas.
. Ti pitit la kaka nan kilòt li.
L’enfant a chié dans sa culotte.
– ceux qui renvoient au trait de comportement
. « Kounyeya, m sekrè pou ou ? »
Tu me tiens à l’écart de tes secrets, maintenant ?
. Ou bannann !
Tu es foutu ! (Traduction approximative)
. Ou kaka !
T’es vendu ! / T’es fichu ! (Traduction approximative)
. Fòk ou pa dlo lolo, paske ou ka pèdi po ou.
Il faut que tu disposes des moyens adéquats pour faire face au danger, sinon tu risques d’en faire les frais. (Traduction approximative)
Une première remarque très frappante concernant ces nominaux est leur caractéristique commune avec les nominaux référant à un animé. Ils véhiculent tous le trait dynamique lié à la notion d’activité : trait de comportement et de description. Ils transmettent en plus des nominaux étudiés précédemment la notion d’activité liée à l’utilisation d’un instrument (cf. Li baton pou li). Rappelons que les « animés » développent le trait spécifique se rapportant à une fonction ou un métier (cf. Li chapant).
L’analyse syntaxique permet, en fait, de visualiser le fonctionnement d’un nombre important de nominaux dans leur capacité à rivaliser avec les verbaux spécialisés dans la fonction prédicative. Il n’en est pas moins vrai que ce choix est conforme au dynamisme de la langue créole. Ainsi, la notion d’activité que dégagent ces nominaux dans leur essence même, le sens qu’ils véhiculent, le contexte socioculturel dans lequel ils sont employés leur procurent la capacité de fonctionner à la manière d’un prédicat verbal. Là, encore, il nous est donné de constater les liens étroits qu’entretiennent le socioculturel et la syntaxe. Un glissement de sens peut entrainer une nouvelle fonction du nominal, donc un nouveau comportement syntaxique correspondant à celui-ci. Même quand les signifiés de certains nominaux tels : rad, fèy, baton, zam, kaye, kaka, sante, sekrè ne changent pas, leur passage du nominal au prédicat est significatif car il implique une sorte de revirement, de l’état de figement à la notion d’activité. Comparer : Sa se yon rad et Li rad legliz, li rad lekòl.
D’autre part, le trait descriptif exprimé par certains nominaux dans leur fonction prédicative mérite une plus grande attention. Dans le département du nord d’Haïti, il est fréquent d’entendre dire « Entèl pa sante menm » ou bien « Li sante kounyeya ? » ou encore « M sekrè pou ou kounyeya ? » Ce sont là des énoncés originaux qui révèlent à quel point la langue est dynamique par l’usage spontané qu’en font les locuteurs dans des situations d’énonciation bien spécifiques.
Considérons maintenant le cas particulier des énoncés comme « Yo Iv Volèl li », en lieu et place de : Yo tiye li menm jan ak Iv Volèl ou « Li Lafontan Jozèf li », en lieu et place de : Li tiye li menm jan ak Lafontan Jozèf. Ce sont des tours élégants de description, des énoncés spontanés mais combien efficaces. Iv Volèl (Yves Volel) et Lafontan Jozèf (Lafontant Joseph), au départ, noms propres, fonctionnent dans les exemples cités comme de véritables verbes d’action.
En définitive, la plupart des lexèmes étudiés, ici, dont le signifié comporte un trait inanimé, renvoient à la notion d’instrument ou à celle de description. Quelques-uns comme bannann (ou bannann !), kaka (msye kaka !) transmettent plutôt l’idée de non-réussite à la manière de chen par exemple (Li chen nan jwèt la). On se rend compte que de manière générale, les nominaux- animés ou non animés- qui peuvent fonctionner comme prédicats sans se véhiculent des traits identiques.
Par ailleurs, si le phénomène culturel est sans doute l’un des traits qui différencient les peuples, chaque langue véhicule les modes de pensée, la culture du peuple qui la parle. Ainsi, par l’emploi de ces nominaux comme prédicats avec la charge sémantique qu’ils charrient, le créole transmet, d’une certaine manière, la culture du peuple haïtien.
2.3- Nominal+ twòp
La valeur de se comme auxiliaire de prédication ayant été prouvée, il fallait vérifier quel rôle pouvaient jouer des éléments comme anpil, konsa, twòp. Il a été révélé que pour la majorité des nominaux qui fonctionnaient déjà comme prédicats sans se, notamment ceux référant à un animé, la présence de ces éléments n’était pas nécessaire. Notons que ces nominaux, en fonction prédicative sans se, évoluent de manière générale comme des verbes intransitifs : Ils ne peuvent avoir ni d’expansion directe ni d’expansion indirecte. De ce fait, il y en a qui ont besoin d’une « béquille » ; dans beaucoup de cas, des éléments comme « twòp » jouent bien ce rôle.
– Ou abitan twòp.
Vous êtes trop rustre.
– Nèg sa a bizismann twòp.
Cet homme est trop rusé.
– Ou bourik twòp.
Vous êtes trop brutal.
– Ou chat twòp.
Rappelons, dans un autre registre, qu’en français, certains verbes ont obligatoirement besoin d’un complément pour que les phrases dans lesquelles ils sont utilisés soient complètes. Des énoncés comme « Tu surveilles », vous racontez », vous traversez », etc. semblent difficiles s’ils ne sont pas employés dans une situation de communication à l’oral qui permet de deviner la suite. En créole, des énoncés tels « ou abitan », « ou anganman », etc. paraissent également peu évidents. En revanche, « ou se abitan », « ou se on anganman » sont très fréquents. Mais, on dit aussi « ou abitan twòp » ou « ou twò abitan », « ou twò anganman ».
Plusieurs remarques s’imposent :
– Twòp, placé après le nom en fonction prédicative sans se, est adverbe et le modifie comme il le ferait pour un prédicat verbal (cf. ou manje twòp).
– Twòp devient twò, placé avant le nom en fonction prédicative sans se ; dès lors le nom se transforme en adjectif. Il en découle que la majorité des noms se référant à un animé, humain ou non humain, pouvant être accompagnés de twòp ou twò peuvent être employés comme adjectifs. Ce qui confirme leurs traits descriptifs et leur capacité à fonctionner comme prédicats sans se. En voici une illustration :
Abitan :- Ou abitan twòp (prédicat).= Vous êtes trop rustre.
Abitan pa mize lavil (nom). = Le paysan ne reste pas longtemps en ville.
Pa gen nèg abitan konsa (adjectif).= Il est rustre comme lui seul.
Kochon :- Ou kochon twòp, monchè ! (prédicat)= Tu es trop malpropre, mon vieux !
Yo tiye tout kochon kreyòl (nom). = On a détruit tous les cochons créoles.
Fanm tankou m pa rete ak gason kochon konsa (adjectif). = Les femmes
de ma nature ne cohabitent pas avec des hommes aussi malpropres.
Bourik : – Nèg sa a bourik twòp (prédicat).= Cet homme est trop brutal.
Bourik la mare nan poto a (nom).= L’âne est attaché au poteau.
Moun bourik konsa, se kay manman l li rete (adjectif). = Des brutes comme
celle-là restent chez leurs mères !
Chen : – Men, ou chen twòp ou menm ! (prédicat).= Mais, vous êtes vraiment sans
scrupule, vous !
Mwen menm, mwen pè chyen (nom). = Moi, j’ai peur des chiens.
Ou konn tande timoun chyen, m poko janm wè konsa ! (adjectif).= Tu as
déjà entendu parler d’enfant sans scrupule, lui, c’est du jamais vu !
Bizismann : – Nèg sa a bizismann twòp (prédicat). = Cet homme est trop affairiste.
Bizismann toujou bezwen fè desan pou san sou machandiz yo (nom). = Les hommes d’affaires cherchent toujours à obtenir le double du prix d’achat de leurs marchandises.
Nèg bizismann tankou JanPyè, m pa annafè avè yo (adjectif). = Je ne
veux pas conclure de marché avec un affairiste comme Jean-
Pierre.
Enfin, il est important de signaler le glissement de sens qui s’effectue du nom au prédicat, changement de statut, changement donc de fonction, le sens de l’adjectif et celui du prédicat étant le trait négatif dans la majorité des cas observés.
2.4- Adjectival+ nominal
Etant admis que beaucoup de nominaux, particulièrement ceux référant à un animé, pouvaient accéder à la fonction prédicative sans se, il fallait pousser l’enquête plus loin pour tester la capacité de ces mêmes nominaux à remplir leur nouveau rôle, accompagnés d’un adjectif comme bon.
Plusieurs possibilités ont été notées :
1- Compatibilité avec la majorité des nominaux référant à un animé et pouvant fonctionner comme prédicats sans se.
– Msye bon doktè.
Cet homme est un bon médecin.
– Li bon teknisyen.
Il est un bon technicien.
– Li bon bòkò konsa, pou ki sa li pa rive trete malad la ?
S’il est un si bon guérisseur, pourquoi n’a-t-il pas pu traiter le malade ?
– Si ou bon gaspiyè vre, peye bal dimanch la pou mwen.
Si réellement vous êtes un grand dépensier, payez-moi l’entrée au bal de ce dimanche.
– Ou di m ou bon avoka men m poko wè kòz ou plede.
Vous vous réclamez d’être un bon avocat, mais je ne vous ai pas encore vu plaider.
L’attestation de nominaux accompagnés de l’adjectif bon comme prédicats sans se appelle plusieurs remarques :
– Ces nominaux référent généralement à des animés humains, ceci confirme la thèse de la prédication nominale sans se.
– D’un autre côté, il est significatif que des nominaux, même accompagnés d’un adjectif, puissent être prédicats sans se, étant donné qu’il est beaucoup plus naturel qu’un adjectif accompagne un nom ayant d’autres fonctions grammaticales que celle du prédicat.
– En revanche, certains noms comme bòkò, gaspiyè, etc. fonctionnant difficilement comme prédicats sans se, remplissent cette fonction grâce à l’emploi de l’adjectif, renforcé par d’autres éléments, tels konsa, vre, etc.
Il reste que, et c’est la règle générale, tout nominal peut fonctionner comme prédicat avec le soutien de se.
2- Compatibilité avec certains nominaux référant à un animé mais qui ne peuvent pas fonctionner comme prédicats sans se.
– Ou di ou bon mouche epi ou ap maltrete madanm ou.
Vous vous traitez de bon mari, pourtant vous maltraitez votre femme.
– M ap wè si ou bon bòfrè vre.
Je vais voir si réellement vous êtes un bon beau-frère.
– M pral wè si ou bon sanba tout bon.
Je vais vérifier si vous êtes un bon samba.
– Men wi, ou bon zanmi vre !
Mais oui, vous êtes vraiment un bon copain !
(sens péjoratif).
On notera, d’une part, que ce cas concerne uniquement des nominaux référant à un animé, et que, d’autre part, l’adjectif remplit, ici, le rôle d’auxiliaire. Il s’agit là d’une nuance tout à fait particulière qui ne concerne pas tous les nominaux référant à un animé, encore moins ceux référant à un inanimé. Il faudra, enfin, préciser que le prédicat ne peut être précédé d’un adjectif qui le modifierait. Si le verbe s’accompagne d’un adjectif, il perd automatiquement ce statut, il devient ipso facto un nominal.
3- Rôle de ki dans la prédication nominale
On a vu à travers cette étude qu’en créole haïtien tous les nominaux pouvaient être prédicats à condition d’être accompagnés de l’auxiliaire de prédication se. On a tenté de démontrer qu’en l’absence de celui-ci, seuls les nominaux présentant des traits identiques au verbal étaient aptes à remplir la fonction prédicative. Il semble que le pronom relatif ki favorise aussi l’accès à la fonction prédicative de tous les nominaux.
Quelques exemples combinant ki et se
. Nou vle wè Jàn ki se lesivyè fanmiy lan.
. Nou bezwen Bòb ki se gid blan k ap vizite Sitadèl la.
. Jak ki se touris etranje ap vizite vil la.
. Al wè Ti Jo ki se radyomann.
. M pral pale ak Jozèf ki se granmoun lontan.
. Jan ki se jènjan bwòdè pa ka pa la.
. M pral wè Fab ki se direktè lekòl Bonbèje.
. Ou menm ki se pwofesè lekòl depi 10 zan…
Suppression de se
. Nou vle wè Jàn ki lesivyè fanmiy lan .
. Nou bezwen Bòb ki gid blan k ap vizite Sitadèl la.
. Al wè Ti Jo ki radyomann.
. M pral pale ak Jozèf ki granmoun lontan.
. Jan ki jènjan bwòdè pa ka pa la.
. M pral wè Fab ki direktè lekòl Bonbèje.
. Ou menm ki pwofesè lekòl depi 10 zan…
Tentative d’éliminer ki
* Jàn lesivyè.
* Bòb gid blan…
* Jak touris…
* Ti Jo radyomann…
. Jozèf granmoun.
. Jan jènjan.
. Fab direktè.
. Ou pwofesè depi 10 zan.
Ce test a permis de constater, d’une part, que ki et se jouent le même rôle d’auxiliaire prédicatif et que, d’autre part, l’élimination de ki dans les phrases où il était utilisé laisse observer des phrases incorrectes. C’est que, dans ces cas, on retrouve des nominaux qui ne remplissent pas les conditions nécessaires pour accéder tout seuls à la fonction prédicative. Les énoncés attestés sont ceux qui contiennent des nominaux qui sont déjà attestés comme pouvant être prédicats sans auxiliaire. En effet, ce sont tantôt des noms de profession, tantôt des noms qui décrivent ou qui traduisent un comportement.
4- Compatibilité avec la marque de l’imperfectif
En linguistique, le terme procès est plus particulièrement attribué à la notion de prédicat. Ainsi, tout ce qui peut correspondre à la notion de procès pourra fonctionner comme prédicat. Il est tout à fait remarquable que des nominaux en créole haïtien soient compatibles avec la marque de l’imperfectif alors que beaucoup de verbes ne le sont pas, tel que l’illustrent les exemples suivants :
Bòs : Pyè ap bòs sou moun la, l ap fè chèz pou kont li.
Pierre est en train de devenir menuisier, il fabrique des chaises tout seul.
Demwazèl : Pitit, se demwazèl ou ap demwazèl, fòk ou amelyore konduit ou.
Tu commences à devenir jeune fille, tu dois améliorer ton .
comportement.
Granmoun : Mesye ! Depi m fè on ti efò, m bouke, m ap granmoun vre !
Tiens ! Au moindre effort, je suis essoufflé, c’est un signe que je suis
en train de vieillir.
Kanzo : Se kanzo l ap kanzo.
Il devient initié petit à petit.
Krab : Men Joslen ap krab kò li.
Regarde Jocelyn en train de se cacher.
Ces nominaux, comme on le voit, décrivent des individus dans leur comportement et dans la pratique de leur métier. De plus, les faits décrits sont présentés dans des situations où coïncident le moment d’énonciation et le déroulement du procès. La valeur prédicative de ces nominaux est donc irréfutable. En fait, des changements ou transformations sont présentés dans un processus constatable de visu (cf. se granmoun ou ap granmoun, Pyè ap bòs sou moun la). Il est, toutefois, important d’attirer l’attention sur un point de différence entre quelques noms de métier comme fòjon, mason, chapant, bòs, etc. et des noms de profession tels doktè, avoka, agwonòm, etc. Les premiers sont compatibles avec la marque de l’imperfectif ap parce que, en général, en Haïti, les personnes qui s’adonnent aux métiers en question apprennent sur le tas. En outre, cet apprentissage, rarement accompagné d’études formelles, s’effectue le plus souvent par la seule pratique. Ce qui fait qu’on peut envisager l’exercice du métier du début à la fin. On évalue donc la performance des praticiens par la réalisation de leurs œuvres et ils peuvent être placés sur une échelle de valeur quelconque.
En revanche, les études de médecine, de droit ou d’agronomie sont toujours et obligatoirement couronnées par un diplôme. Ainsi, on n’est médecin, avocat ou agronome qu’une fois le cycle d’étude terminé et que le parchemin aura été délivré à l’étudiant en question. Il est peu évident d’envisager que quelqu’un soit en train d’être médecin ou avocat (* O ! gade ! Men l’ap doktè ou se avoka l’ap avoka ??). On l’est une fois pour toute. En tout cas, c’est ce que la pratique de la langue permet d’observer.
En fin de compte, l’analyse des faits de langue envisagés ici permet de constater que les nominaux accessibles au rôle prédicatif sans se et compatibles à la marque de l’imperfectif ap (hic et nunc) se comportent comme des verbaux processifs. Ainsi, les lexèmes qui se réfèrent à des noms de métier ou considérés comme tels (se chapant l’ap chapant, se kanzo l’ap kanzo) ou à un état physique susceptible d’être saisi ou « appréhendé dans sa dynamique » (cf. R. Damoiseau), peuvent prendre la marque de l’imperfectif. Exemples : Se demwazèl l ap demwazèl, se jènjan l ap jènjan.
V- En guise de conclusion
Il convient de rappeler que :
– l’adjectival, en fonction prédicative, présente les mêmes caractéristiques que le verbal. Il peut être affecté par les catégories temporelle, aspectuelle et modale.
– l’adverbe et la préposition, comme prédicats, ont un fonctionnement identique : ils sont incompatibles avec la marque de l’imperfectif ap.
– contrairement au français, beaucoup de nominaux en créole haïtien peuvent fonctionner comme le verbal dont ils présentent tous les traits.
Dans ces conditions, peut-on réellement parler de classes syntaxiques en créole haïtien ? L’enchevêtrement des classes grammaticales semble être une spécificité de cette langue qui étonne plus d’un en s’écartant de certaines données traditionnelles.
D’un autre côté, cette étude s’était limitée à un nombre restreint de nominaux : 1705 dont 278 ont été présentés comme pouvant remplir la fonction prédicative sans se. Il est évident qu’il en existe beaucoup d’autres. Parmi les cas qui n’ont pas été envisagés ici, on peut citer :
– les nominaux renvoyant à un lieu (Madan Jan larivyè, Antwàn legliz, Andre lekòl, etc.)
– les nominaux indiquant le nom d’une ville ou d’un quartier (Filip okap, Alyèt jeremi, Pòl jakmèl, etc.)
– les nominaux indiquant l’heure, le temps, le jour, etc. (Li midi, li lè, li jou, jodi a vandredi, etc.).
Signalons enfin que, mis à part certains noms renvoyant à un inanimé (Li kaye 15 men m p ap vann li, Li rad legliz, li rad lekòl), les noms fonctionnant comme prédicats ont généralement pour sujets un syntagme nominal (nom ou pronom) renvoyant à un animé humain (Bòb chen nan jwèt la, Li pwofesè lekòl, M sekrè pou ou kounyeya, etc.). Par contre, ceux qui indiquent l’heure, le temps, le jour, ont, généralement pour sujets li qui s’apparente à la forme impersonnelle en français (Il est minuit vs Li minui ou Il se fait jour vs Li jou).
(*) La prédication nominale en créole haïtien, mémoire de licence en linguistique, U.E.H., F. THÉLUSMA
Courte biographie de Fortenel THÉLUSMA
Linguiste, didacticien du français langue étrangère (FLE)
Enseignant-chercheur à l’École normale supérieure, Université d’État d’Haïti (U. E. H.)
Ancien professeur à l’Université Quisqueya (1997-2018), à la faculté des sciences humaines U.E.H. (2004-2018) ;
Ancien professeur à plein temps au Centre de formation pour l’École fondamentale (CFEF) de Port-au-Prince (1999-2013) ; ex-directeur du CFEF de Port-au-Prince (2013-2015)
Champ de recherche prioritaire :
. Pratique et enseignement – apprentissage du créole et du français en Haïti.
. Analyse contrastive
. Analyse du discours
Profil professionnel :
Enseignant de français, de didactique du français, chercheur, traducteur.
Publication
Une quinzaine d’articles (entre autres, parmi les plus récents) :
Analyse d’un échantillon de chansons créoles de la musique haïtienne
https://fondaskreyol.org/article/analyse-echantillon-chansons-creoles-musique-haitienne, 07-09-23Une
« Bwa kale », quelle interprétation dans la conjoncture actuelle ?
https://www.potomitan.info/ayiti/bwa.kale.php, 21-05-23
Propositions pour un enseignement-apprentissage efficace du français langue seconde en Haïti. htts://blogs.mediapart.fr, 21 septembre 2021
Analyse d’un texte poétique en créole de Jean-Claude Martineau : sa portée par rapport à la réalité socioéconomique et politique de l’époque, https : //www.madinin-art.net, 29 octobre 2021
Le génie créateur du créolophone haïtien, www.berrouet.oriol.com, novembre 2018
Le locuteur bilingue haïtien : entre effet de mode et snobisme (www.potomitan.info), 27-12-20)
Ouvrages :
Pratique du créole et du français en Haïti : entre un monolinguisme persistant et un bilinguisme compliqué (2021), C3 Éditions, Delmas 31, Haïti.
Le créole haïtien dans la tourmente ? Faits probants, analyse et perspectives (2018), C3 Éditions, Delmas 31, Haïti.
L’enseignement-apprentissage du français en Haïti : constats et propositions (2016), C3 Éditions, Delmas 31, Haïti.
Eléments didactiques du créole et du français : le cas de la prédication nominale, des verbes pronominaux et du conditionnel (2009), Imprimerie Éditions des Antilles S.A. Route de l’aéroport, Haïti.
Co-auteur de :
La didactisation du créole au cœur de l’aménagement linguistique en Haïti (2021), (ouvrage collectif coordonné par R. Berrouët-Oriol), les Editions Zémès à Port-au-Prince, Haïti et CIDIHCA à Montréal, Canada
La francophonie haïtienne et la francophonie internationale : apports d’Haïti et du français haïtien (2021), (ouvrage collectif sous la direction de Renauld Govain, doyen de de la FLA, U.E.H.), JEBCA Editions, États-Unis
Littérature
« Drôle de vie » (roman), (2022), Éditions du CIDIHCA, Montréal, Canada
Je me plains de rêver (recueil de poésie), (2020), Imprimerie Média-Texte, Port-au-Prince
Manuels scolaires (une quinzaine de manuels de créole et de français pour l’École fondamentale et le nouveau secondaire)
Fortenel THÉLUSMA
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