Une étude de la BRH révèle les dysfonctionnements entre banques, crédit et activité économique
Dans son dernier Cahier de Recherche (N°7), la Banque de la République d’Haïti (BRH) publie une analyse approfondie des interactions entre les indicateurs monétaires, la performance bancaire et l’activité économique sur la période 2010-2024. Quatre études empiriques mettent en lumière des tendances clés, souvent contre-intuitives, qui éclairent les défis structurels de l’économie haïtienne.
L’étude révèle une divergence croissante entre la croissance des agrégats monétaires (base monétaire et M3) et l’évolution de l’activité économique, mesurée par l’Indicateur Conjoncturel d’Activité Économique (ICAE). Malgré une expansion monétaire soutenue (+119 % pour M3 entre 2018 et 2024), l’économie haïtienne a enregistré six années consécutives de récession. Les modèles économétriques confirment l’absence de corrélation significative entre ces variables, soulignant l’inefficacité des canaux de transmission monétaire traditionnels dans un contexte d’instabilité politique et de dominance budgétaire.
Les gains de change, qui représentent une part croissante du Produit Net Bancaire (PNB), sont surtout influencés par deux facteurs :
1- Les mesures réglementaires (comme la Circulaire 114 de 2020) ont accru la formalisation du marché des changes, boostant les revenus des banques.
2- L’inflation joue un rôle négatif : en période de crise, les agents économiques se tournent vers le marché informel, réduisant les opportunités d’arbitrage pour les banques.
Contre toute attente, la taille des banques ou leur engagement dans le crédit n’a pas d’effet significatif sur ces gains.
L’analyse des prêts non productifs (PNP) entre 1996 et 2023 montre que leur hausse est corrélée à l’inflation et aux chocs externes (comme le séisme de 2010). Paradoxalement, la dépréciation de la gourde améliore à long terme la qualité des portefeuilles, grâce à l’adaptation des emprunteurs. En revanche, le PIB réel n’a quasiment aucun impact, reflétant la déconnexion entre la sphère bancaire (qui finance une clientèle restreinte) et l’économie informelle (60 % de l’emploi).
Si les outils monétaires (taux directeurs, réserves obligatoires) influencent marginalement l’octroi de crédit à court terme, leur effet s’estompe à long terme. La BRH souligne que l’efficacité de ces instruments reste entravée par l’insécurité, l’informalité et la faible intermédiation financière.
Ces travaux confirment la nécessité d’une approche intégrée, combinant réformes structurelles (sécurité, gouvernance) et politiques macroprudentielles ciblées. La BRH plaide pour un renforcement des régulations du marché des changes et une meilleure coordination entre politiques monétaire et budgétaire, afin de reconnecter les sphères réelle et financière de l’économie haïtienne.
Cliquez sur le lien ci-dessous pour lire l’intégralité du document de la BRH https://www.brh.ht/wp-content/uploads/Cahier-de-recherche-No-7.13.3.pdf
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