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RADIO DROMAGE
Alors que la nation haïtienne traverse l’une des crises les plus profondes de son histoire contemporaine, certains secteurs appellent à la création d’une nouvelle constitution en remplacement de la Constitution de 1987. Si ce débat est légitime dans un État stable, il paraît aujourd’hui inopportun, voire contreproductif, compte tenu du contexte actuel. L’objectif de cet article est de démontrer, avec rigueur, que les priorités d’Haïti se situent ailleurs : dans la restauration de la sécurité, la reconstruction institutionnelle et la réponse aux besoins fondamentaux de la population.
Depuis l’assassinat du président Jovenel Moise dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021, Haïti sombre dans le chaos le plus total.
Premièrement, la nomination du Dr. Ariel Henry le même mois comme premier ministre qui n’aura rien foutu ,après un (1) an huit (8) mois à la primature alors qu’il était cense traiter le problème de l’insécurité et organiser des élections en référence à l’article 149 de la constitution nationale,sinon qu’a sa démission forcée à la date du 25 avril 2024, il n’a laissé comme seule réalisation qu’ une structure mort-née d’un Haut Conseil de Transition (HCT),l’ancêtre d’une autre structure politique du même acabit dénommée Conseil Présidentiel de transition (CPT) née d’un accord politique ,celui du 3 avril 2024.Composée de neuf (9) membres affublés chacun du titre de président de la république à tour de rôle, le CPT s’est vite transformé en un cauchemar institutionnel par rapport à des questions de légitimité, de légalité, et de constitutionalité de son modèle atypique d’institution agissant comme pouvoir exécutif.
Deuxièmement , la débâcle des forces publiques incluant la Mission Multinationale d’Appui à la Sécurité (MMAS) dirigée par le Kenya face aux gangs armés désormais désignés d’organisations terroristes par la communauté internationale dont les Etats Unis via un communique de presse du département d’Etat à la date du 2 mai 2025,qui étendent leur contrôle à chaque territoire occupé et commissariat incendié et revendiquant haut et fort, au su et vu de tout le monde leurs actes criminels pour mieux illustrer leurs puissances et créer ainsi la panique au sein de la population civile désormais livrée à elle seule comme en pâture aux attaques incessantes de l’association de malfaiteurs de « Viv Ansanm ».
Troisièmement, les scandales de corruption qui ont éclaboussé des membres au sein du CPT en plus de l’incapacité flagrante de cette structure politique gouvernementale à répondre aux défis, notamment la problématique de l’insécurité, sont désormais une préoccupation nationale. Récemment, face à la gravite et l’augmentation de la criminalité à l’actif des gangs armés, le CPT a dû recourir aux services de mercenaires de Blackwater, une firme militaire privée américaine de services sécurité fondée par l’américain Erik Dean Prince, un ancien officier de Navy Seal aux Etats-Unis , information confirmée par Fritz Alphonse Jean, coordonnateur du CPT, ce 23 juin dernier lors d’une rencontre avec des journalistes, sans toutefois faire le point sur les détails du contrat conclu entre sa structure gouvernementale et ladite compagnie militaire privée; alors que, du point de vue administratif , l’Etat se doit d’agir en toute transparence lorsqu’il s’agit de contracter avec une entité tierce, et d’ailleurs, tout effort d’engagement financier, stratégique et tactique dans ce contexte devrait logiquement aller dans le sens du renforcement ,de l’optimisation des forces publiques nationales.
Tout ceci met en lumière des zones d’ombre dans la politique du CPT qui peine à assumer ses responsabilités régaliennes face à une population haïtienne vivant dans la précarité extrême et de plus en plus désenchantée face aux promesses non tenues et des actions ratées du gouvernement pour lui apporter de la sécurité, de meilleures conditions de vie sociale et économique, ce qui relève d’ailleurs des obligations constitutionnelles (art 19, const.).
Autant dire que le menu est indescriptible et indéchiffrable pour toute tentative rationnelle de compréhension de la réalité économique et sociopolitique haïtienne à l’heure actuelle. Le tableau affiche un pays dont toutes les structures institutionnelles étatiques sont littéralement détruites. Pas de gouvernance, pas de leaderships étatiques, mais un CPT inopérant et incapable. C’est bien sûr dans ce contexte de chaos social et politique, et de vide institutionnel qu’intervient le projet de la nouvelle constitution pour Haïti. Inscrire une nouvelle constitution dans une réalité sans institutions légitimes revient à institutionnaliser l’arbitraire. En effet, l’absence de Parlement, de Cour constitutionnelle fonctionnelle et d’une société civile bien structurée rend tout processus de réforme constitituinel ou d’adoption d’une constitution suspect et potentiellement dangereux pour l’équilibre démocratique. Le secrétaire général des Nations Unies, Kofi Annan, affirmait à juste titre : « Une Constitution n’est rien sans les institutions pour la défendre. » Ainsi, vouloir instituer une nouvelle constitution dans un tel contexte revient à construire sur du sable mouvant.
Haïti figure parmi les pays sinon le seul où les droits sociaux et économiques ont statut de parent pauvre. Aux dernières statistiques du Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD) en 2023 Haïti est à la 166 -ème place sur 193 sur l’Indice de Développement Humain. Les données n’ont pas changé pendant les années suivantes car la réalité s’est davantage dégradée à un niveau dangereux notamment avec le phénomène des gangs armés puisque désormais les citoyens n’ont pas seulement faim et soif, mais encore craignent pour leur vie dont la plupart sont des déplacés qui vivent sur des places et dans des locaux publics, à la merci de violences et d’attaques des gangs et de toute sorte de crimes dont le vol et le viol voire le meurtre.
En d’autres termes, Haïti fait face à une vraie crise humanitaire. En pareille situation, tout gouvernement responsable met le focus sur l’adoption de mesures appropriées pour traiter le mal, c’est-à-dire, les défis auxquels font face le peuple haïtien devait être une question d’urgence nationale s’il était établi un gouvernement avisé et responsable. Quoi d’autre justifie la raison d’être d’une structure de gouvernement sinon qu’assumer ses responsabilités régaliennes.
Le peuple haïtien qui souffre et a peur n’est pas dans l’état psychologique pour savoir s’il a besoin d’une constitution ou non. Tout processus engagé en ce sens pour adopter une constitution dans le contexte de crise que vit le peuple haïtien est un mépris flagrant à ses droits et sa dignité à la fois comme citoyen et comme personne humaine. Un débat sur l’adoption d’une nouvelle constitution en Haïti n’a de sens que si les besoins élémentaires des citoyens sont satisfaits. Comme l’exprimait Aimé Césaire : « Quand le ventre a faim, la démocratie devient un luxe. » Autrement dit, tant que les conditions de vie ne sont pas
améliorées, toute réforme demeure théorique et déconnectée du réel.
On ne met pas la charrue avant les bœufs, dit-on. L’État haïtien doit d’abord retrouver son autorité, garantir l’état de droit, restaurer la confiance des citoyens en l’Etat et reconstruire, renforcer les institutions d’Etat. A présent, Haïti est amputée de deux éléments fondamentaux parmi les trois (3) conditions essentielles de l’existence d’un Etat : un gouvernement et un territoire car Etat c’est avant tout une population, un territoire et un gouvernement.
Depuis l’assassinat du président Jovenel Moise dans la nuit du 6 au 7 juillet 2021, Haïti est tombée dans un vide du droit et de la loi. Pour le dire simplement, Haïti a perdu ses repères institutionnels. Cette situation non seulement met en évidence les problèmes de légitimité, de légalité, de constitutionalité liés notamment à la création du CPT à la suite d’un accord politique, mais encore elle indique l’absence à la fois de souveraineté et d’autorité, ou de tout ordre étatique tout court. Cette réalité devient préoccupante avec un CPT faisant statut de coquille vide, c’est-à-dire sans pouvoirs ni compétences réels pour imposer l’autorité de l’Etat sur les 27 750 kilomètres carrés du territoire national incluant l’espace aérien et maritime qui passent de plus en plus sous le contrôle de groupes armées.
Pour autant que les problèmes ici évoqués ne sont pas réglés, l’adoption d’une nouvelle constitution ne sera qu’un mouvement de coup d’épée dans l’eau. Ce qui serait regrettable de gaspiller du temps face à l’urgence de sortir le peuple haïtien de la peur et de l’indignité. Ce n’est qu’à partir du moment où les citoyens auront accès à de meilleures conditions de vie sociales, économiques mais surtout sécuritaires qu’il sera alors possible d’envisager l’adoption d’une nouvelle constitution ou la révision de celle en vigueur. A ce moment-là, le processus sera crédible, inclusif et le texte ainsi adopté sera durable.
En d’autres termes, je formule ma position comme suit : avant de penser à réécrire des lois, apprenons d’abord à les respecter. Ce rappel met en lumière que le respect des normes en vigueur est déjà un chantier prioritaire avant toute réforme en profondeur. Pour le dire simplement, nous devons d’abord corriger notre culture de violation des normes qui a la vie dure dans notre histoire politique même dans les simples détails en lieu et place de vouloir à chaque fois amender ou en adopter de nouvelles car les règles de droit sont conçues pour corriger nos vices et non à répondre à nos caprices.
En somme, la priorité pour Haïti aujourd’hui n’est pas l’amendement de la Constitution, voire l’adoption d’une nouvelle, mais le rétablissement de l’ordre public, le fonctionnement des institutions, et la réponse aux besoins urgents de la population. Réformer le texte fondamental ou en adopter un nouveau dans le chaos reviendrait à détourner l’attention des vrais défis et à fragiliser davantage la démocratie. Ainsi, l’urgence est d’agir sur le terrain, avant de rêver à de nouvelles lois.
Me Nadine Dorelus
Avocate –
Spécialiste en genre et développement international
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