La liberté de la presse est garantie en Haiti par la Constitution
Le Premier ministre Garry Conille pourrait-il donner l’ordre aux journalistes étrangers (CNN, NYT, Miami Hetrald…) de ne pas s’aventurer dans les zones où opèrent les forces de l’ordre, au point d’interviewer des bandes criminelles ou tout autre acteur ? Pourquoi veut-il censurer la presse locale, qui n’est d’ailleurs pas très bien vue par les policiers des services du Premier ministre ? Ne prend-il pas directement la responsabilité, mercredi soir, des journalistes en ligne agressés par des policiers dans l’exercice de leurs fonctions ?
Haiti – Constitution de 1987 / :Article 278.2 :
L’Assemblée Nationale arrête avec le Pouvoir Exécutif, les garanties constitutionnelles qui peuvent être
suspendues dans les parties du territoire mises en état de siège.
L’intégrité et la liberté de la presse sont des piliers incontournables de toute société démocratique. Toutefois, ces principes fondamentaux peuvent être sérieusement compromis lorsqu’un gouvernement inconstitutionnel et sans le consentement d’un parlement, décide de limiter ou de censurer les champs d’activités journalistiques. Ce texte explore les circonstances dans lesquelles un tel gouvernement peut justifier la censure des activités jde la presse, en particulier dans le contexte de la déclaration de l’état d’urgence, et examine les implications de telles actions pour la liberté de la presse garantie par des conventions internationales.
La déclaration de l’état d’urgence est généralement utilisée par les gouvernements pour répondre à des crises graves, telles que les catastrophes naturelles, les troubles civils ou les menaces à la sécurité. Selon l’article 4 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), l’état d’urgence permet à un gouvernement de déroger à certaines obligations afin de rétablir l’ordre public et la sécurité. Toutefois, ces dérogations doivent être proportionnelles, temporaires et non discriminatoires.
Un gouvernement qui n’est pas régi par une loi ou une constitution, et qui n’a pas le consentement d’un parlement, peut invoquer l’état d’urgence pour justifier des mesures extraordinaires. Néanmoins, l’absence de cadre juridique et de contrôle parlementaire pose la question de la légitimité et de la légalité de ces mesures. En effet, un état d’urgence déclaré sans limite de temps précise et sans contrôle parlementaire peut devenir un outil de répression plutôt qu’une réponse proportionnée à une crise.
La censure des activités journalistiques dans un tel contexte est particulièrement inquiétante. La liberté de la presse, protégée par l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, comprend le droit de rechercher, de recevoir et de répandre des informations et des idées de toute espèce. Les restrictions à cette liberté ne peuvent être justifiées que par des motifs légitimes et doivent être nécessaires et proportionnées.
En cas d’état d’urgence, un gouvernement peut imposer certaines restrictions aux journalistes, par exemple en limitant l’accès à des zones spécifiques pour des raisons de sécurité. Ces restrictions doivent toutefois être clairement définies et justifiées par des raisons impérieuses de sécurité nationale. En l’absence d’une telle justification, la censure généralisée ou le refus d’accès aux journalistes constitue une violation flagrante de la liberté de la presse.
Un exemple pertinent est l’état d’urgence déclaré en Égypte en 2013. Le gouvernement égyptien a utilisé l’état d’urgence pour justifier des mesures sévères à l’encontre des médias, notamment la fermeture de chaînes de télévision et l’arrestation de journalistes. Bien que les autorités aient invoqué des raisons de sécurité nationale, les mesures prises ont été largement perçues comme une tentative de contrôler l’opinion publique et d’étouffer les voix dissidentes.
La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) s’est également prononcée sur plusieurs affaires concernant la censure des médias pendant l’état d’urgence. Dans l’affaire Mehmet Hasan Altan c. Turquie (2018), la CEDH a souligné que même en période d’état d’urgence, les mesures restrictives doivent être strictement nécessaires et proportionnées aux exigences de la situation.
Références
- Déclaration universelle des droits de l’homme, 1948.
- Principes de Syracuse sur les limitations et dérogations aux dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, 1984.
- Rapporteur spécial des Nations Unies sur la promotion et la protection du droit à la liberté d’opinion et d’expression, divers rapports.
- Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO), rapports sur la liberté de la presse en période de crise.
Constitution1987.pdf (omrh.gouv.ht)
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