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Mia Mottley: Une icône  mondiale de la justice climatique

today2025-06-28

Mia Mottley: Une icône  mondiale de la justice climatique
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Il y a des voix qui résonnent bien au-delà de leurs frontières. Celle de Mia Mottley, Première ministre de la Barbade, est de celles qui bousculent l’ordre établi, interpellent les puissants, et redonnent espoir aux plus vulnérables. À l’heure où les petits États insulaires sont souvent relégués au rang de victimes silencieuses des bouleversements climatiques, Mia Mottley incarne une rupture. Avec son éloquence sans concession, sa maîtrise des enjeux financiers mondiaux et sa détermination farouche, elle est devenue l’une des figures les plus respectées du Sud global. Portrait par la journaliste Nancy Roc.

Mia Amor Mottley naît le 1er octobre 1965 à Bridgetown, capitale de la Barbade. Fille de Elliott Deighton Mottley, avocat et homme politique, et petite-fille de Ernest Deighton Mottley, maire de Bridgetown dans les années 1950, elle grandit dans une famille baignant dans la politique. Très tôt, elle est exposée aux enjeux de justice sociale, d’éducation et de gouvernance.

Après ses études secondaires à la Queen’s College de Barbade, elle poursuit son parcours universitaire à la London School of Economics (LSE), où elle obtient un diplôme en droit. Cette formation britannique lui apporte une vision à la fois juridique et stratégique, qu’elle appliquera tout au long de sa carrière.[1]

L’ascension politique d’une pionnière

En 1991, Mia Mottley fait ses premiers pas en politique active en se portant candidate pour le Parti travailliste de la Barbade (Barbados Labour Party, BLP) . Elle est alors âgée de seulement 26 ans, ce qui fait d’elle l’une des plus jeunes candidates de cette élection. Mais si elle perd cette première tentative électorale, trois ans plus tard, elle remporte son siège et devient à 29 ans la plus jeune membre du gouvernement en tant que ministre de l’Éducation, de la Jeunesse et de la Culture.

En 2001, elle est nommée procureure générale, la première femme à occuper ce poste à la Barbade. Elle devient vice-première ministre en 2003 et présidente du Parti travailliste de la Barbade (BLP).

Après une période dans l’opposition, Mottley revient au pouvoir en 2018 avec une victoire écrasante, remportant les 30 sièges de la Chambre d’assemblée. Elle est la première femme à devenir Première ministre du pays. En 2022, elle est réélue avec le même score historique. [2]

Dès 2018, elle se confronte à une dette publique supérieure à 175 % du PIB. Elle négocie avec le FMI et lance un plan d’ajustement courageux, tout en préservant les aides sociales. En parallèle, elle modernise l’économie avec des réformes numériques, une restructuration fiscale, et une stratégie ambitieuse de transition énergétique pour atteindre 100 % d’énergies renouvelables d’ici 2030.[3]

Elle devient aussi une icône de la justice sociale en s’opposant publiquement à l’homophobie, en promouvant l’égalité raciale et en ouvrant la voie à un débat sur les réparations de l’esclavage. Son gouvernement transforme le pays en république en novembre 2021, rompant avec la monarchie britannique et affirmant la souveraineté barbadienne. Cet acte symbolique affirme la souveraineté pleine et entière de la Barbade, tout en illustrant la vision panafricaniste et décoloniale de Mottley, qui déclare lors de la cérémonie :« C’est maintenant à nous d’écrire notre propre chapitre avec confiance et ambition. »[4]

La voix du Sud globl: l’initiative Bridgetown

Mottley se distingue dès la COP26 en 2021 par un discours vibrant appelant à une refonte du financement climatique. Ce qui motive Mia Mottley à se dresser avec force dès la COP26 en 2021, c’est l’urgence existentielle que vit son pays face aux ravages du changement climatique. Petite nation insulaire menacée par la montée des eaux, les ouragans de plus en plus violents et l’érosion de ses ressources naturelles, la Barbade incarne la vulnérabilité extrême de nombreux États du Sud global. Mottley dénonce l’iniquité d’un système financier international qui maintient ces pays dans la dette tout en les exposant aux conséquences d’un réchauffement climatique qu’ils n’ont pas causé. Son appel vibrant à une refonte du financement climatique, porté par un discours mêlant indignation et lucidité, vise à mobiliser des ressources équitables pour l’adaptation, repenser la dette, et responsabiliser les grands pollueurs. C’est la voix d’une dirigeante caribéenne qui, au nom de la justice climatique, refuse que son pays soit sacrifié au nom de l’indifférence des puissants.[5]

Ce discours, d’une durée de 7 minutes, a été salué comme l’un des plus puissants de la conférence. Il a contribué à faire de Mia Mottley une figure incontournable de la justice climatique mondiale et à mettre à l’agenda la question de la perte et du dommage climatique pour les pays vulnérables.

Lancée en 2022 par la Première ministre de la Barbade, Mia Mottley, l’Initiative de Bridgetown est devenue le fer de lance d’une nouvelle vision du financement climatique mondial[6]. Son objectif ? Réformer l’architecture financière internationale – Fonds monétaire international, Banque mondiale, banques multilatérales – pour que les pays du Sud, particulièrement vulnérables aux catastrophes climatiques, puissent accéder à des financements rapides, équitables et abordables. Mottley propose notamment des moratoires automatiques sur la dette en cas de catastrophe, la création de nouveaux fonds d’urgence, et l’émission massive de droits de tirage spéciaux (DTS) pour permettre aux pays touchés de respirer.

Présentée d’abord lors de la COP27, puis débattue activement au Sommet de Paris pour un nouveau pacte financier mondial en juin 2023, l’initiative a reçu un large soutien, y compris de la France, du FMI et du G7.

Le leadership climatique de Mia Motley

Mia Mottley est reconnue internationalement comme une leader du Sud global. Elle est nommée l’une des 100 personnalités les plus influentes du monde par TIME (2022, 2023, 2025)[7]. Elle reçoit le TIME Earth Award en juin 2025 pour son plaidoyer en faveur d’une architecture financière plus juste et d’une mobilisation climatique ambitieuse.

Elle réclame une responsabilité accrue des pays pollueurs: « Ceux qui ont créé ce problème doivent le financer. » lance-t-elle lors de l’ouverture de la COP26 à Glasgow, le 1er novembre 2021, devant les dirigeants mondiaux réunis pour la conférence climat(incriuster reference en note de bas de page) Dans un discours majeur, elle a lancé un vibrant appel à la justice climatique : « The moral position has always been that the polluter must pay ». Elle y soulignait avec force que « les pays pollueurs doivent assumer financièrement », dénonçant l’écart entre la responsabilité historique des nations du G20 (à l’origine d’environ 80 % des gaz à effet de serre) et leur contribution actuellement dérisoire aux efforts pour financer l’adaptation des pays vulnérables Incrustrer réféerence + note de fin de page)

Sa rhétorique est puissante, inclusive et sans complaisance. Elle n’hésite pas à critiquer l’inaction climatique de la communauté internationale ou à exiger des mécanismes de compensation pour les pertes et dommages.

Malgré les soutiens symboliques, les propositions de Mottley butent sur la lenteur des réformes institutionnelles et la réticence de certaines puissances. Elle milite pour l’opérationnalisation rapide des fonds climatiques et une gouvernance plus démocratique du FMI et de la Banque mondiale.

Une première mondiale pour affronter le climat sans s’enfoncer dans la dette

Malgré les vents contraires du changement climatique, la Première ministre de la Barbade, Mia Mottley, continue de tracer un chemin audacieux. Fin novembre 2024, son gouvernement a réalisé une prouesse inédite : le tout premier échange « dette contre résilience climatique » au monde.[8] En clair, la Barbade a renégocié près de 300 millions de dollars de dettes pour libérer plus de 125 millions de dollars destinés à des projets écologiques vitaux.

Grâce à cet accord soutenu par la Banque interaméricaine de développement et la Banque européenne d’investissement, l’île pourra investir dans une grande station de traitement et de recyclage des eaux usées, essentielle pour affronter les pénuries d’eau à venir. D’autres fonds serviront à renforcer l’agriculture, protéger les mangroves et garantir une eau plus propre à la population. « Nous prouvons qu’un petit pays peut faire bouger les lignes mondiales », a résumé Mia Mottley. Un exemple concret et inspirant pour les autres pays vulnérables au climat.[9]

Une voix devenue indispensable

Mia Mottley incarne une nouvelle génération de leadership: ancrée dans une identité caribéenne forte, mais projetée à l’échelle globale. Elle conjugue action politique locale et plaidoyer international avec une vision de justice, de durabilité et d’équité. Que ce soit à la tête de la Barbade ou sur les tribunes de l’ONU, elle réinvente la place des petites nations dans le grand concert du monde.

En tant que journaliste haïtienne caribéenne, je ne peux qu’exprimer mon admiration profonde pour cette femme d’État qui, avec audace et lucidité, redéfinit la justice climatique. Elle parle pour nous tous — peuples de la mer, enfants des tropiques — qui refusons de disparaître en silence. Elle prouve qu’une île de moins de 300 000 habitants peut porter la voix de milliards.

Mia Mottley ne se contente pas de gouverner : elle incarne un espoir. Celui d’un monde plus juste, où la parole des plus petits ne sera plus marginalisée, mais essentielle.

Nancy Roc exerce son métier de journaliste indépendante depuis plus de 30 ans. Détentrice d’un Master en Éducation Relative à l’Environnement de l’Unisversité du Québec à Montréal (UQAM), la problématique des changements climatiques la préoccupe depuis plus de 20 ans. A travers son entreprise, Incas Productions, elle a créé en 2021 le premier projet d’éducation, de prevention et de sensibilisation aux catastrophes naturelles et aux changements climatiques  pour les enfants et les jeunes en Haiti, en utilisant des contenus en intelligence artificielle générative (IA générative) et des webinaires pour atteindre les bénéficiaires sur le terrain.

[1] https://fr.wikipedia.org/wiki/Mia_Mottley

[2] https://parispeaceforum.org/fr/speakers/mia-amor-mottley-premiere-ministre-barbade/

[3] Mottley, M. A. (2021). UNGA Address. United Nations General Assembly, 76th Session.
Voir aussi : The Guardian. Barbados Plans to Become 100% Renewable by 2030, 2021. https://www.theguardian.com/environment/2021/sep/24/barbados-renewable-energy-2030

[4] BBC News. Barbados becomes a republic and parts ways with the Queen, 30 November 2021.
https://www.bbc.com/news/world-latin-america-59470843 ↩

[5] United Nations Climate Change Conference (COP26). Prime Minister of Barbados Mia Mottley’s Address to COP26, 1 November 2021.

🔗 https://unfccc.int/news/barbados-pm-mia-mottley-delivers-powerful-speech-at-cop26

[6] Barbados PM launches blistering attack on rich nations at Cop27 climate talks

[7] The 100 Most Influential People of 2022 Mia Mottley

[8] Barbados Launched the World’s First Debt-for-Climate-Resilience Operation

[9] Barbados debt-for-climate swap nears as EIB, IDB finalise guarantees

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Le taux de référence calculé par la BRH pour ce vendredi 27 juin 2025 est de 130,91 HTG pour 1 USD

Écrit par: Viewcom04

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