Le Premier ministre Garry Conille, qui rencontrait mardi soir la diaspora haïtienne à New York, a, dans un exposé surprenant, vanté les mérites d’une animation nocturne baptisée « Tisourit ». Selon lui, ce programme, où les jeunes Capois passent leurs nuits à jouer au football ou à boire des boissons alcoolisées, serait le reflet d’une vie sûre et dynamique au Cap-Haïtien. Loin d’être rassurante, cette prise de position interroge : le gouvernement encourage-t-il l’oisiveté au détriment d’une véritable politique de développement pour les jeunes ?
De plus, le Premier ministre a insisté sur le fait que « les gens jouent au foot même la nuit », une preuve que tout marche sur des roulettes dans la capitale du Nord où le quota de policiers pour 1000 habitants n’est pas atteint. Derrière cette description apparemment anodine se cache pourtant une réalité inquiétante. Ce programme, destiné à occuper les jeunes la nuit, dévoile surtout le manque criant d’opportunités d’emploi et d’activités structurantes pour cette frange de la population. Majoritairement au chômage, les jeunes Capois ou comme tant d’autres jeunes du pays, passent leurs nuits à s’adonner à des loisirs et des distractions qui, loin de leur ouvrir de nouvelles perspectives, les enferment dans une routine nocturne sans lendemain.
Le terme « Tisourit » évoque une sorte de refuge dans le jeu et la fête nocturnes à décibels de musique hautement élevés, ce qui n’est pas sans conséquence sur la qualité de la vie. Pourtant, en encourageant une telle pratique, le Premier ministre tend à ignorer les véritables enjeux économiques et sociaux auxquels sont exposés les jeunes. Plutôt que de chercher à mettre en place des initiatives favorisant l’insertion professionnelle ou l’engagement citoyen, Conille glorifie un mode de vie nocturne sans but productif.
Cette conception soulève une autre question fondamentale : peut-on vraiment parler de développement d’un pays lorsque ses jeunes restent actifs la nuit et somnolent le jour ? Conille, en vantant ce programme nocturne aux membres de la diaspora, mardi soir à new York, ne précise pas ce que ces jeunes apportent à l’économie ou à la vie sociale du pays à travers ces activités. Il évoque les matchs de football qui se prolongent tard dans la nuit, sans mentionner les conséquences d’un tel rythme de vie sur l’éducation, la santé ou la productivité ou sur les relèves.
Le Premier ministre se désintéresse du fait que ce mode de vie prive les jeunes de la possibilité de se lever tôt, de travailler ou de suivre une formation susceptible d’améliorer leur situation socio-économique. En se focalisant sur la description d’une réalité nocturne et festive, il masque le problème plus profond de l’oisiveté des jeunes, dont beaucoup restent sans perspectives d’avenir.
La déclaration de Conelle reflète une vision réductrice du rôle de la jeunesse dans le développement d’Haïti. Plutôt que de présenter des plans de création d’emplois, de formation ou d’encouragement à l’entreprenariat, le Premier ministre s’attarde sur ce qu’il appelle « La Nuit Tisourit », une activité qui reste très éloignée des enjeux fondamentaux du pays.
A aucun moment, le Premier ministre n’évoque des actions d’encadrement de ces jeunes dans des programmes structurés, ou des initiatives pour les sortir de cette dynamique nocturne. L’accent mis sur ces activités suggère un manque de vision globale de la part du gouvernement quant à l’avenir de sa jeunesse.
Tout aussi paradoxal est le fait que le Premier ministre mette en avant le football comme preuve de l’activité du Cap-Haïtien, sans évoquer le niveau du sport dans le pays. A l’heure où Haïti peine à se positionner sur la scène internationale du football, cette référence nocturne donne l’impression d’une activité déconnectée des ambitions sportives et nationales. Loin d’être un moyen de promouvoir la discipline, il s’agit plutôt d’un prétexte pour occuper les jeunes pendant des heures qui pourraient être consacrées à une formation ou à des activités productives.
Enfin, cette glorification de l’oisiveté déguisée en festivités nocturnes interpelle sur la vision réelle du gouvernement quant à l’avenir de la jeunesse haïtienne. Comme dans tout pays en voie de développement, la jeunesse caproise a besoin de perspectives, de travail et de formation pour se construire un avenir meilleur. En encourageant implicitement une vie nocturne centrée sur le divertissement, le gouvernement détourne sa responsabilité de créer des conditions propices à l’épanouissement et à l’engagement productif des jeunes.
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