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Le thé est le plaisir des Bangladais, même si les ouvriers sont confrontés à des difficultés.

today2024-06-19 3

Le thé est le plaisir des Bangladais, même si les ouvriers sont confrontés à des difficultés.
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Les ouvriers préparent leur repas avec des feuilles de thé.

Publié à l’origine sur Global Voices en Français

Le domaine de Mulnicherra est la plus ancienne plantation de thé d’Asie du Sud. Image via Wikipedia par Shahnoor Habib Munmun. CC BY 3.0.

[Sauf mention contraire, tous les liens de ce billet renvoient vers des
pages Web en anglais].

En 2023, le Bangladesh a atteint une étape importante dans la production de thé, avec une production surpassant pour la première fois les 102,9 millions de kilogrammes. Ceci marque la première fois où la production était supérieure à 100 millions de kilogrammes dans le pays depuis que les colons britanniques[fr] avaient introduit les cultures de thé expérimentales dans la région en 1840. La majeure partie du thé produit est utilisé au niveau national, ce qui témoigne de l’amour profond du Bangladesh pour le thé.

Cette histoire d’amour entre les Bangladais et le thé est souvent célébrée. Le thé les accompagne dans les moments joyeux comme dans les moments sombres. Une tasse de thé devient souvent le moyen d’exprimer de l’affection, avec le sentiment de « je désire votre compagnie autour d’un thé » étant un refrain courant. Pour capturer cette essence, une marque de thé populaire au Bangladesh a adopté[bn] le slogan « Le thé est synonyme d’une vie épanouie. »

Cependant, pour ceux qui travaillent dans les plantations de thé[fr] et qui cueillent inlassablement les feuilles pour répondre à la demande du marché, le thé n’est pas synonyme d’une vie épanouissante. À cause de l’inflation en hausse et la pauvreté qui persistent, ils sont résolus à manger des feuilles de thé crues[bn] venant de la plantation en tant que repas, surtout lors du déjeuner au travail. Contraints par nécessité plutôt que par choix et ne pouvant pas se permettre d’acheter de la viande et des légumes, ils utilisent souvent les feuilles de thé crues comme substitut alimentaire. Le nom de ce plat à base de feuille de thé est « patichakha »[bn]. Cette nourriture vendue dans la rue dans la région des plantations de thé fait diverger, certains l’aime[bn] alors que d’autre non.

Patichakha. Capture d'écran de la vidéo YouTube de Sharaf Cooking Vlogs. Utilisation légale de la photo.

Patichakha. Capture d’écran de la vidéo YouTube de Sharaf Cooking Vlogs. Utilisation légale de la photo.

Qu’est-ce que le « patichakha » ?

Le salaire journalier[fr] d’un ouvrier dans les plantations de thé au Bangladesh est de 170 Taka bangladais (1,33 EUR) s’ils atteignent le quota qui est de cueillir 25 kilogrammes de feuilles venant de la plantation par jour. Actuellement, le marché des prix pour tous les produits de première nécessité connait une croissance fulgurante, avec un taux d’inflation de presque 10 pour cent.

Avec des revenus si maigres, les ouvriers des plantations de thé ont des difficultés à s’offrir des aliments de bases comme le riz, le poisson ou la viande. Habituellement, ils commencent à cueillir les feuilles de thé tôt le matin et le riz qu’ils transportent pour le déjeuner perd sa fraîcheur rapidement. Par conséquent, préparer et consommer « patichakha » venant des feuilles de thé fraîchement cueillies est une option pratique et sûre. Les ouvriers sentent que manger des feuilles de thé crues pendant les heures de travail les aide à combattre la fatigue, grâce à la caféine qu’elles contiennent. Cependant, certains nutritionnistes mettent en garde face à la consommation régulière de feuilles de thé crues, déclarant qu’elles peuvent avoir un impact négatif sur la santé.

Dans tous les coins du Bangladesh, la présence d'échoppes de thé est un phénomène courant. Photo prise par Biplab Sarkar et utilisée avec sa permission.

Dans tous les coins du Bangladesh, la présence d’échoppes de thé est un phénomène courant. Photo prise par Biplab Sarkar et utilisée avec sa permission.

La tradition de préparer et consommer des spécialités gastronomiques à base de feuilles de thé a été transmise de génération en génération.

La recette du « patichakha » est relativement simple. Elle consiste à rouler des feuilles de thé crues à la main et les mélanger avec de la purée de pommes de terre, des oignons, des piments verts émincés et un filet d’huile de moutarde.

La cheffe Shikha Pal a posté une recette de Patichakha sur le site Cookpad[bn]. Selon ses instructions, pour préparer du Patichakha pour deux personnes, vous aurez besoin de 2 cuillères à soupe de feuilles de thé crues, 1 pomme de terre bouillie, 1/2 tomate hachée, 1/2 oignon haché, 1/2 cuillère à café d’ail émincé, 1/2 cuillère à café de sel, 1/2 cuillère à café de piments verts émincés,  1 cuillère à soupe de coriandre hachée et une cuillère à café d’huile de moutarde.

Pour faire le Patichakha, il faut couper en dés les feuilles de thé, les oignons, les piments, la coriandre, les pommes de terre et l’ail et mélanger tous les ingrédients dans un bol.

Dans une publication LinkedIn, Adbul Hannan, employé d’entreprise, a partagé[bn] son opinion sur ce plat:

Bien que je ne trouvais pas ce plat particulièrement appétissant, les ouvriers en mangent quotidiennement. Malgré leurs contraintes financières qui les empêchent souvent d’ajouter de l’huile de moutarde et des piments verts, ils le mangent quand même. En effet, le prix d’un kilogramme de poulet de chair dépasse les 200 BDT (1,57 EUR) alors que leur salaire journalier est de 170 BDT (1,33 EUR), contre 120 BDT (1,02 USD) auparavant. Cela rend l’achat de légumes encore plus difficile. Pour eux, il est plus facile de manger deux poignées de riz avec un peu de « patichakha » que d’acheter une botte de légumes.

Cette vidéo Youtube[bn] par Saif’s World montre comment le Patichkha est fait:

L’industrie du thé du Bangladesh

Les origines de la culture de thé au Bangladesh remontent à la période du colonialisme britannique. La première plantation de thé a été installée dans la ville portuaire de Chittagong en 1840, alors que la culture commerciale a commencé à Sylhet en 1857. À présent, le Bangladesh possède une industrie du thé florissante comprenant plus de 167 plantations de thé sur 2,79,507 acres (1,131 kilomètre carré) de terres, principalement regroupés à Sylhet, Habiganj et Maulbibazar. Ces plantations créées de l’emploi à plus de cent quarante mille ouvriers qui travaillent dans les champs, dont 75 pour cent d’entre eux sont des femmes qui viennent de familles avec un héritage multigénérationnel dans la culture de thé.

Dans les années 1860 et 1870, les régions d’Assam et de Sylhet ont connu un succès commercial dans les plantations de thé, incitant beaucoup d’entreprises étrangères à investir. Par conséquent, la production de thé a commencé à se développer. Avec l’expansion des plantations de thé, la demande de main d’œuvre a fortement augmenté. Ces opportunités ont attiré les ouvriers des plantations de thé qui ont migré de différentes régions d’Inde touchées par la famine pour venir dans l’actuel Bangladesh.

Cependant, leur sort ne s’est pas amélioré après avoir commencé à travailler dans les plantations de thé. Dans le livre « History of the Gardens and Workers of Bangladesh, » Riyadh Mahmud and Alida Binte Saki ont écrit:

Les propriétaires des plantations les considéraient comme leurs propriétés, contrôlant leur liberté et les transférant souvent d’une plantation à l’autre. Ils les laissent rarement quitter les plantations. Ils étaient venus ici à la recherche d’une vie meilleure, mais ils se sont retrouvés dans un état de quasi-emprisonnement. Ils n’étaient peut-être pas en prison, mais leur situation n’était pas mieux que celle d’esclaves.

Qu’il s’agisse du goût, de l’odeur ou de la chaleur, le quotidien des Bangladais exige une tasse de thé pleine de parfums ! Cependant, les gens n’entendent guère parler des luttes des ouvriers des plantations de thé, qui sont contraints de survivre en consommant du patichakha.

Écrit par: Viewcom04

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