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Taïwan équilibre des tensions identitaires complexes à l’investiture présidentielle

today2024-06-01 2

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L’évènement célébrait les ethnies autochtones et chinoises

Publié à l’origine sur Global Voices en Français

[Sauf mention contraire, tous les liens de ce billet renvoient vers des pages Web en anglais]

Cérémonie d’investiture présidentielle à Taipei. Photo de Filip Noubel, utilisée avec autorisation

Le 20 mai a marqué l’investiture du huitième Président de la République de Chine à Taïwan, Lai Ching-te ( 賴清德 ), ou William Lai, comme il est également connu en anglais. Une cérémonie a eu lieu dans le centre de Taipei pour montrer comment Taïwan a remodelé son récit national pour refléter sa propre histoire, mais aussi un remaniement mondial des relations internationales.

La cérémonie a eu lieu devant le bâtiment du bureau présidentiel de Taipei où des milliers de Taïwanais ainsi que plus de 600 invités étrangers se sont réunis aux premières heures du 20 mai pour prendre place avant un spectacle bien orchestré qui a débuté à 9 heures du matin, heure locale.

Le spectacle a commencé par des danses mettant en vedette deux héritages différents de Taïwan : les groupes autochtones et l’ethnie chinoise. L’île abrite seize tribus officiellement reconnues [en] qui représentent aujourd’hui moins de trois pour cent de la population [en]. Appelés 原住民  ou yuanzhumin en chinois mandarin – littéralement « les nations qui vivent ici à l’origine » – les peuples autochtones appartiennent à la grande famille austronésienne. Victimes de longue date de la colonisation chinoise et japonaise ( Taïwan a été une colonie japonaise de 1895 à 1945), elles jouissent maintenant de tous les droits juridiques et culturels, y compris, plus récemment, le droit de faire inscrire leur nom exclusivement  dans leur langue [en] sur les cartes d’identité de l’État. Auparavant, ils devaient utiliser des noms chinois. Un groupe d’Autochtones demande maintenant à être reconnu comme une 17e tribu officielle [en], ce qui souligne l’évolution des identités et des revendications autochtones à Taïwan. 

Cérémonie d’investiture présidentielle de Taïwan à Taipei. Un groupe de danse autochtone se précipite à leur performance. Photo par Filip Noubel, utilisée avec autorisation.

L’autre identité principale exposée était la culture chinoise ethnique, un terme qui englobe différentes langues et traditions originaires de la Chine continentale. Les premiers colonisateurs chinois sont arrivés à Taïwan principalement à partir du XVIIe siècle. Les symboles de cette culture, comme l’opéra chinois et les dragons, étaient bien présents pendant la cérémonie. 

Spectacle de danse inspiré des traditions traditionnelles de l’opéra chinois. Photo de Filip Noubel, utilisée avec autorisation.

Mais cette identité plurielle est aussi l’une des questions politiques les plus sensibles à Taïwan, et cette tension était évidente dans le langage utilisé pour décrire le pays. Officiellement, le gouvernement taïwanais se considère comme le gardien légal et politique de la République de Chine, une entité politique née en Chine continentale à Nanjing en 1911, à la fin de la dernière dynastie Qing. À ce jour, il maintient un calendrier distinct utilisé dans tous les documents officiels, et souvent dans la pratique commerciale, à partir de 1912, ce qui signifie que l’année 2024 correspond à l’année 113.  

Le président Lai y a fait allusion lorsqu’il a dit dans son discours [en] que :

So long as we identify with Taiwan, Taiwan belongs to us all — all of the peoples of Taiwan, regardless of ethnicity, irrespective of when we arrived. Some call this land the Republic of China, some call it the Republic of China Taiwan, and some, Taiwan; but whichever of these names we ourselves or our international friends choose to call our nation, we will resonate and shine all the same. So let us overcome our differences and stride forward, with our shared aspirations, to meet the world.

Tant que nous nous identifions à Taïwan, Taïwan nous appartient à tous – -à tous les peuples de Taïwan, peu importe leur origine ethnique, peu importe le moment où nous sommes arrivés. Certains appellent cette terre la République de Chine, certains l’appellent la République de Chine Taïwan, et certains Taïwan; mais quel que soit le nom que nous ou nos amis internationaux choisissons d’appeler notre nation, nous résonnerons et brillerons tout de même. Surmontons donc nos différences et allons de l’avant, avec nos aspirations communes, pour rencontrer le monde.

En chinois mandarin, la langue officielle de Taïwan et de la Chine, il y a une distinction à faire. La République de Chine s’appelle Zhonghua Minguo (中華民國), où Zhonghua signifie le terme Chine en anglais; tandis que la Chine comme République populaire de Chine s’appelle Zhongguo (中國). Dans son discours de 30 minutes, le président Lai a principalement utilisé le terme Taïwan pour décrire son pays et a conclu qu’il espérait une relation pacifique avec la Chine. 

Pour en savoir plus, lire A plurality of Chinese languages [en] (Une pluralité des langues chinoises)

Cheval bleu géant célébrant la diversité de Taïwan lors de l’investiture présidentielle. Photo par Filip Noubel, utilisée avec autorisation.

Les questions de genre étaient également largement présentes lors de la cérémonie. La présidente sortante Tsai Ing-wen a été la première femme élue présidente en Asie. Comme Lai l’a fait remarquer, c’est également sous elle que Taïwan est devenu le premier pays à légaliser les unions entre personnes du même sexe en 2019. La nouvelle vice-présidente, Hsiao Bi-khim (蕭美琴), est également une femme, née d’un père taïwanais et d’une mère américaine.

La sensibilité à la diversité linguistique fait également partie du nouveau discours, qui a été souligné ce jour-là en invitant deux rappeurs à chanter à la cérémonie en hakka et en taïwanais, deux langues appartenant à la famille sinitique [en] qui sont largement parlées dans toute l’île.

Pour en savoir plus, lire Decoding eight years of Taiwan’s presidency by Tsai Ing-wen: Interview with French journalist Arnaud Vaulerin [en] (Décryptage des huit années de présidence de Tsai Ing-wen à Taiwan : entretien avec le journaliste français Arnaud Vaulerin)

L’artiste Vuize (王鍾惟) a chanté en hakka – une caractéristique de son profil, comme le montre cette vidéo sur YouTube :

Et le chanteur ED (柯蕭) a chanté en taïwanais. Voici une vidéo de cette chaîne YouTube :

Enfin, Lai a souligné le lien de Taïwan avec le monde dans son discours. Aujourd’hui, seulement 12 pays [en] ont reconnu l’île diplomatiquement, après que la République populaire de Chine est venue remplacer Taïwan à l’ONU en 1971. Il s’agit principalement d’États du Pacifique Sud et des Caraïbes, mais aussi du Vatican et du Guatemala, ainsi que d’Eswatini et du Paraguay, deux pays qui ont envoyé leurs chefs d’État à la cérémonie.

La cérémonie s’est terminée avec des hélicoptères et des avions de chasse survolant la grande place, ce qui témoigne de la volonté de Taïwan de recourir à la dissuasion militaire alors que les tensions avec Pékin s’intensifient.

Hélicoptères portant le drapeau de Taïwan sur la place lors de l’inauguration présidentielle. Photo de Filip Noubel, utilisée avec autorisation.

Mais malgré cela, l’ambiance était largement festive, et le message de Taïwan en tant que lieu accueillant, un pays agréable à visiter et sa confiance en son avenir ont dominé la cérémonie, comme le montrent les images suivantes :

Le plus vieux drapeau de Taïwan arborait un tigre. Photo de Filip Noubel, utilisée avec autorisation.

Jeune groupe de musique. Photo de Filip Noubel, utilisée avec autorisation.

Performance de baseball. Photo de Filip Noubel, utilisée avec autorisation

Spectacle de danse traditionnelle. Photo de Filip Noubel, utilisée avec autorisation

Écrit par: Viewcom04

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