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15 ans après le Goudougoudou du 12 Janvier, Haïti face à son pire séisme : l’effondrement de l’État

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L’Edito du Rezo

Haïti, 15 ans après le 12 janvier 2010 : un effondrement inexorable

Le 12 janvier 2010 demeure à jamais gravé dans la mémoire collective des Haïtiens comme le jour où tout a basculé. En quelques secondes, un tremblement de terre d’une ampleur sans précédent a détruit des vies, des infrastructures et des espoirs. Quinze ans plus tard, le pays, loin de s’être relevé, se trouve inexorablement plongé dans le chaos. Les espoirs de reconstruction, portés par une aide internationale massive, ont laissé place à une profonde désillusion. Comment, après tant de promesses, Haïti a-t-elle pu s’enfoncer autant ?

Après le tremblement de terre, Haïti a été dirigé par une succession de gouvernements élus lors d’élections entachées d’allégations de fraudes massives. La corruption, déjà endémique, a atteint des proportions phénoménales, rendant illusoire toute perspective de redressement. La dilapidation des fonds PetroCaribe, symbolisée par des enquêtes volumineuses sans suite judiciaire, témoigne de l’impunité qui règne dans les sphères du pouvoir. Ni Michel Martelly, ni Jovenel Moïse, ni leurs successeurs n’ont voulu ou pu demander des comptes sur ces ressources essentielles à la reconstruction du pays.

À cause de ce manque de transparence, le cercle vicieux de la méfiance à l’égard des institutions s’est renforcé et un fossé infranchissable s’est creusé entre la population et ses dirigeants. L’effondrement des structures de l’État a engendré un vide qui a été rapidement comblé par des acteurs non étatiques, notamment des gangs armés criminels terroristes.

La mainmise des gangs sur le pays

Au cours de la dernière décennie, les bandes armées se sont fédérées, tissant une toile d’influence qui s’étend sur une grande partie du territoire. Ce phénomène est d’autant plus inquiétant qu’il s’inscrit dans une dynamique où ces groupes ne se contentent plus de contrôler des quartiers : ils aspirent désormais à intégrer les structures du pouvoir. L’implication de personnalités politiques dans leur ascension, comme l’a évoqué récemment un cadre du PHTK, accentue une réalité alarmante où la criminalité organisée et la politique sont imbriquées.

Le maintien du contrôle exercé par ces groupes armés rend la situation encore plus dramatique : ni les dirigeants ni les organisations internationales ne peuvent accéder à certaines zones du pays, y compris à des sites hautement symboliques comme celui du tremblement de terre de 2010. Cette impasse est le reflet d’un État en déconfiture, incapable de garantir la sécurité de ses citoyens.

En quinze ans, Haïti n’a connu que deux élections présidentielles, la dernière en 2016. Depuis, l’absence d’élections démocratiques traduit une profonde crise de légitimité politique. Aujourd’hui, le gouvernement actuel, jugé illégitime, se prépare à organiser des élections avec un Conseil électoral controversé. Pire encore, il entend modifier la Constitution de 1987 par référendum, une initiative percevable comme un coup de force institutionnel.

Ces dynamiques ne contribuent qu’à alimenter la défiance et les tensions sociales, rendant tout processus électoral fiable presque impossible dans un climat d’insécurité généralisée et de polarisation politique.

Une tragédie nationale, quinze ans après

Le tremblement de terre du 12 janvier 2010 a anéanti des vies et laissé un pays en ruines, mais le véritable séisme qui secoue Haïti depuis quinze ans est institutionnel, social et politique. La tragédie humaine qui se déploie sous nos yeux est encore plus foudroyante et destructrice : elle consume l’espoir d’un redressement.

En ce quinzième anniversaire, Haïti est plongée dans le marasme économique : comment stopper cette descente aux enfers ? La réponse passe nécessairement par la reconstruction de l’État, la lutte sans merci contre la corruption et l’ouverture d’un processus inclusif de dialogue national. Mais, dans un contexte de polarisation extrême et d’insécurité généralisée, ces ambitions demeurent pour l’instant hors de portée.

Haïti est aujourd’hui à la croisée des chemins. Pour que ce drame ne devienne pas irréversible, la communauté nationale et internationale doit redéfinir ses approches et ses priorités. Il ne s’agit plus seulement de reconstruire des infrastructures ou d’apporter une aide humanitaire, mais de reconstruire un tissu social et institutionnel profondément déchiré.

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