La réunion du Conseil de Sécurité sur Haïti, « une façon de freiner l’élan des Haïtiens dans la lutte réelle contre les gangs », soutient le Dr Renaud de NERHO
Entretien avec Dr. Josué Renaud de NERHO sur la réunion du Conseil de Sécurité concernant Haïti
Rezo Nòdwès (RNO) : Dr. Renaud. Mercredi après-midi, le Conseil de sécurité tiendra une séance publique, et nous citons, « ‘suivie de consultations à huis clos, pour discuter d’une proposition visant à transformer la Mission Multinational Security Support (MSS) en une opération de maintien de la paix des Nations Unies ». Quelle est votre première réaction à cette initiative ?
Dr. Josué Renaud (JR) :Me. Auguste, cette proposition, bien qu’elle puisse sembler ambitieuse, n’est en réalité qu’une façade destinée à maintenir Haïti sous tutelle internationale. Ironiquement, elle intervient au lendemain du 221e anniversaire de la bataille de Vertières, cette révolution historique qui a aboli un système d’esclavage inhumain, dont la France fut l’un des principaux architectes.
La MSS, créée en octobre 2023 dernier, n’a montré aucun progrès significatif sur le terrain, alors pourquoi penser qu’un changement de statut en opération de maintien de la paix apporterait des résultats ? Ce sont toujours les mêmes acteurs, avec les mêmes stratégies inefficaces. Cette réunion, demandée par la Chine et la Russie, est également suspecte, car ces deux pays se positionnent souvent comme critiques des politiques américaines, mais finissent toujours par s’aligner. Le véritable problème en Haïti, ce ne sont pas les gangs, mais le manque de volonté internationale pour permettre une vraie autonomie du pays qu’il souhaiterait peut-être voir se retirer de l’Amérique.
RNO : La Sous-Secrétaire générale aux affaires politiques, Rosemary DiCarlo, interviendra lors de cette réunion, avons-nous appris également. Que pensez-vous de son rôle dans ces discussions où le sort d’Haiti, Première République Noire Libre au Monde, se dispute à New York ?
JR : Rosemary DiCarlo, comme beaucoup d’autres fonctionnaires de l’ONU, joue un rôle protocolaire sans réel impact sur les décisions concrètes. Elle représente un appareil international qui préfère éviter les discussions sur les véritables responsabilités des puissances étrangères dans le chaos haïtien. Par exemple, l’ONU n’a jamais sérieusement abordé la question de la prolifération des armes en Haïti, souvent orchestrée par des réseaux internationaux, ou encore les récentes déclarations de l’ambassadeur américain à Port-au-Prince admettant des contacts avec des gangs criminels activement recherchés par, ne riez pas, Me. Auguste, par le FBI. Son intervention risque fort d’être une répétition de déclarations superficielles sur la nécessité de stabilisation et d’assistance, tout en éludant les véritables causes de l’instabilité en Haïti. En parlant de discours vides de substance, avez-vous écouté Leslie Voltaire mardi dernier ? Il n’a même pas eu l’audace de se rendre à Vertières pour honorer un moment aussi symbolique de notre histoire.
RNO : Selon vous, Dr. Renaud, pourquoi l’Équateur et les États-Unis, co-auteurs de cette proposition, insistent-ils pour transformer la MSS en une mission de maintien de la paix ?
JR : L’Équateur et les États-Unis cherchent avant tout à consolider leur influence géopolitique dans la région. Pour les États-Unis, qu’il s’agit de l’administration démocrate ou républicaine, se menm kout baton an pou Haiti. Il s’agit de maintenir Haïti dans un état de dépendance sous prétexte d’aide, de faire et de défaire les gouvernements, les présidents, les premiers ministres, les chefs de police… Quant à l’Équateur, un pays qui lutte déjà contre ses propres crises internes, son rôle dans ce dossier est clairement dicté par des intérêts stratégiques, et non par une véritable volonté d’aider Haïti, lequel pays a donné naissance à l’Equateur -. Ce projet d’envoi de troupes, qui risque de reproduire les échecs de la MINUSTAH – notamment la tragédie du choléra – ne cherche pas à résoudre les véritables problèmes d’Haïti. Il cherche plutôt à maintenir un statu quo profitable à des puissances étrangères aux visées néocolonialistes, ainsi qu’à une élite locale corrompue. Il vise également à freiner la dynamique actuelle de libération populaire, car les gangs restent, semble-t-il, des outils stratégiques pour certains intérêts. Rappelez-vous la stratégie d’Ariel Henry en avril 2023, qui illustre parfaitement cette instrumentalisation des gangs à des fins politiques… Une mission authentique de maintien de la paix devrait s’appuyer sur une consultation transparente avec le peuple haïtien, afin de refléter ses aspirations, et non être imposée de l’extérieur.
RNO : Quels sont les risques d’une telle transformation de la mission MSS en une opération de maintien de la paix des Nations Unies paseke nèg Kenya yo pap regle anyen serye la ?
JR : Les risques sont nombreux. Tout d’abord, cela renforcera l’idée que Haïti ne peut pas résoudre ses problèmes seule, ce qui est faux. Cela prolongera également la présence étrangère, qui, au lieu de stabiliser le pays, a souvent exacerbé les tensions. Regardez l’exemple de la MINUSTAH : des années de présence, des milliards dépensés, des élections contestées, yo vyole ti gason, yo vyole ti fi et aucun progrès durable. Pire encore, cette nouvelle mission pourrait détourner des ressources essentielles qui pourraient être utilisées pour renforcer nos propres institutions, comme la police nationale, l’armée d’Haiti ou encore le système judiciaire à genoux.
Enfin, elle transmet un message préoccupant aux Haïtiens : celui d’une souveraineté constamment fragilisée, laissant entendre qu’ils ne devraient pas chercher à prendre leur destin en main. Elle semble dissuader tout mouvement populaire, comme l’initiative Bwa Kale, qui visait à apporter une réponse locale et déterminée à l’insécurité orchestrée et entretenue.
RNO : Que recommandez-vous aux acteurs nationaux et internationaux à la veille de cette réunion ?
JR : Aux acteurs nationaux, je lance cet appel : il est grand temps de reprendre le contrôle, de mettre un terme à cette complaisance et d’apprendre à dire non aux ingérences qui paralysent notre souveraineté. Posez-vous cette question essentielle : pourquoi sommes-nous dans cette situation ? Pourquoi sommes-nous réduits à une condition où nous n’avons même pas le droit de résoudre nos propres problèmes pour le bien-être collectif ? Ce questionnement est crucial pour amorcer un véritable sursaut patriotique et engager un changement en profondeur.
Les dirigeants haïtiens, – je n’inclus pas les trois accusés de braquage de la BNC ki pa dwe sou mounn ankò – doivent exiger un dialogue transparent sur les véritables enjeux et refuser toute solution imposée qui ne reflète pas les aspirations du peuple.
Aux acteurs internationaux, les Grans de ce monde, je recommande d’abandonner les politiques paternalistes et d’investir dans le renforcement des capacités locales. L’assistanat n’a jamais permis à un pays de sortir durablement de la pauvreté. Au contraire, il entretient une dépendance qui freine l’autonomie et le développement des capacités locales nécessaires à une véritable prospérité…Haïti a besoin de partenaires engagés, et non de gestionnaires étrangers dictant son avenir. Au peuple haïtien, aux braves gens de Canapé-Vert, ceux de Pétion-Ville, d’Arcahaie, de Pont-Sondé et d’ailleurs, je dis : restez mobilisés. La liberté et la souveraineté ne se décident pas dans des salles fermées à New York, mais se gagnent sur le terrain, avec courage, détermination et unité, comme l’a démontré Dessalines le 18 novembre 1803, en infligeant une défaite retentissante à la plus puissante armée de son temps.
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