Les premiers policiers kenyans ont posé le pied en Haïti ce mardi (25 juin 2024) – 200 pour le moment sur le millier promis par Nairobi. Ils vont commencer à organiser la logistique, à baliser le terrain et à mener des opérations de reconnaissance, avant de commencer à appuyer la police nationale haïtienne dans sa lutte conte les gangs.
Les policiers kenyans sont arrivés sous les applaudissements sur tarmac de l’aéroport international Toussaint-Louverture – en treillis, arme en bandoulière et casque sur la tête, brandissant le drapeau kenyan, rapporte notre correspondante à Port-au-Prince, Marie-André Bélange. Le Premier ministre Garry Conille a remercié le président kenyan William Ruto et le peuple kenyan. Dans les rues de Port-au-Prince, les Haïtiens ont commenté cette arrivée, avec un seul souhait, exprimé par ce technicien en communication : « J’aimerais qu’ils se mettent au travail pour combattre les bandits armés. J’espère qu’ils ne vont pas faire comme les précédentes missions de l’ONU qui venaient prendre du bon temps ».
« Les Kenyans sont là, quels sont nos plans ? », s’interroge de son côté Frantz Duval dans Le Nouvelliste. L’éditorialiste déplore que, comme lors des deux débarquements précédents de forces étrangères en Haïti, en 1994 et 2004, « il n’existe aucun vrai plan pour construire et consolider les institutions démocratiques ni les organes de sécurité. Encore une fois, le pays va essayer de bricoler des solutions en cours de route ». La seule différence, remarque-t-il, c’est que « toute la classe politique, tous les représentants du secteur privé, toutes les associations de la société civile et tutti quanti sont au pouvoir » avec le Conseil présidentiel de transition. Et « plus personne de la classe politique ne met en cause » l’opportunité de ce déploiement.
Quelle est la situation à Port-au-Prince ?
Quel est dans le détail le contexte sécuritaire à Port-au-Prince, où les soldats kenyans commencent à prendre leurs quartiers ? Diego Da Rin, expert pour International Crisis Group, revient sur la situation dans la capitale. Les gangs sont censés contrôler 80% de la ville, mais « il y a des nuances à apporter », entre les bastions complétement contrôlés par les gangs, où les forces de sécurité ne peuvent plus entrer, et les « zones d’influence » où ces gangs kidnappent et rackettent.
Par ailleurs, la situation a « énormément évolué depuis le début des attaques concertées », fin février 2024, menées par deux bandes à l’origine rivales : les débuts ont été « extrêmement agressifs », avec les attaques de l’aéroport, des ports, mais aussi des commissariats – pour éviter que ceux-ci ne puissent servir de base à la police et la force internationale. Mais depuis fin mai 2024, on constate une diminution des attaques violentes contre les forces de sécurité. Un des chefs de gang, Jimmy Chérizier, a publié il y a quelques jours un appel au dialogue, dans lequel il interpelle directement le Premier ministre. « Depuis qu’il y a des plans qui commencent à avancer pour envoyer une mission de sécurité pour soutenir la police », explique Diego Da Rin, « Chérizier a toujours demandé des dialogues et pas des combats. Il y a quelques mois, il le demandait de manière très agressive. » Là, il y a « un changement de ton », d’autant qu’il s’adresse directement au Premier ministre « alors que jusqu’ici, il avait toujours refusé de s’asseoir autour d’une table avec le gouvernement de transition dirigé par Ariel Henry ».
Le journal Le Nouvelliste a interrogé le Premier ministre sur le dernier appel au dialogue de Jimmy Chérizier. « La réponse est évidente », selon Garry Conille : « D’abord, il faut déposer les armes ; ensuite, reconnaître l’autorité de l’État haïtien avant toute autre disposition et nous verrons ce que nous pouvons faire ». Et le Premier ministre s’est également adressé aux membres des gangs : « je suis certain que vous êtes fatigués avec ces destructions que vous avez créées. Je suis sûr et certain que vous êtes prêts à faire votre mea culpa ».
Les gangs sont-ils effectivement prêts à s’engager dans un processus de désarmement ? « On ne peut pas dire avec certitude si tous les gangs seraient prêts à entrer dans un processus de négociation », estime Diego Darin. Jimmy Chérizier se présente comme le porte-parole d’une coalition de gangs. Et on ne sait pas si le reste des chefs de gangs, moins visibles médiatiquement, vont vouloir s’aligner derrière sa position.
Un journaliste du Wall Street Journal jugé à Moscou
Evan Gershkovich, dont le procès commence ce mercredi (26 juin 2024) à Moscou, est accusé d’espionnage. « Appeler ça un procès est injuste pour Evan, et c’est une continuation de cette parodie de justice qui a déjà duré trop longtemps », écrit ce mercredi, le rédacteur en chef du Wall Street Journal, qui le répète : Evan Gershkovich est innocent. Le journaliste a été arrêté, il y a un peu plus d’un an, lors d’un reportage en Russie, il est accusé d’espionnage et risque 20 ans de prison, rappelle le Washington Post, qui précise que c’est la première fois depuis la Guerre froide qu’un journaliste américain est jugé pour espionnage. Le New York Times pointe « l’absence de preuves avancées par les autorités russes ». L’an dernier (2023), le Département d’État américain avait jugé qu’il était détenu à tort, ce qui, explique le journal, « oblige le gouvernement fédéral à travailler à sa libération ».
Au Guatemala, le journaliste Ruben Zamora reste en prison
Ruben Zamora, 67 ans, fondateur du quotidien El Periodiquito, un journal connu pour ses enquêtes sur la corruption au sein du gouvernement de l’époque, celui d’Alejandro Giammatei. Un journal poussé à la fermeture, tandis que Ruben Zamora était condamné à six ans de prison pour blanchiment d’argent. Il devait être libéré, rappelle La Hora – une liberté conditionnelle avec assignation à résidence. Mais le procureur Rafael Corruchiche a annoncé qu’à sa demande, la cour d’appel avait révoqué cette liberté conditionnelle, écrit Prensa Libre. Rafael Corruchiche, rappelle Prensa Comunitaria, figure sur la liste des acteurs corrompus et démocratiques des États-Unis ; et l’actuel président Bernardo Arevalo, élu l’an dernier (2023) sur un programme anticorruption, l’accuse d’avoir tout fait pour l’empêcher d’arriver au pouvoir. Sur le réseau social X, José Carlos Zamora, le fils de Ruben Zamora, a réagi au maintien de son père en prison : « cela fait 697 jours que mon père est détenu arbitrairement. Il est détenu arbitrairement depuis 697 jours dans le cadre d’un faux procès au cours duquel tous ses droits ont été violés ».
Le Journal de la 1ère
Le premier tour des législatives se passe samedi (29 juin 2024) en Guadeloupe…